Ça bloque pour les renforts
De nombreux soignants intérimaires ne souhaitent plus épauler les unités Covid dans les hôpitaux.
« Je fais un appel, notamment dans les Ehpad : nous avons besoin de renfort», a déclaré il y a quelques jours le ministre de la Santé, Olivier Véran. Cet appel sera-t-il entendu? Rien n’est moins sûr. Conscient des efforts fournis par les soignants dès le début de l’épidémie de Covid-19, Emmanuel Macron leur promettait à tous en mars le versement d’une prime exceptionnelle pouvant aller jusqu’à 1 500 €. Mais les premiers de cordée ne l’ont pas tous reçue. Les intérimaires et vacataires sont exclus de ce dispositif.
«La pénurie de soignants guette l’ensemble des établissements. »
Lucie Gabrielli, Intérim’r Santé
« Une pétition a été lancée et a recueilli à ce jour plus de 37500 signatures, et nous avons interpellé un grand nombre de parlementaires sur cette discrimination injuste, faute d’avoir un retour d’Olivier Véran », indique Ludovic Boillon, référent santé du syndicat FO. Pourtant, les besoins sont colossaux. «On a eu un boom phénoménal de l’intérim santé ces derniers mois, observe Lucie Gabrielli, directrice du pôle santé d’Intérim’r Santé, réseau national d’agences d’intérim. Mais nous avons beaucoup de mal à répondre à la demande, et les offres peinent à trouver preneurs. Après la première vague qui a fait beaucoup de mal, la pénurie de soignants guette l’ensemble des établissements de santé. Malgré la vocation, sans reconnaissance, il est plus difficile aujourd’hui de remobiliser les soignants intérimaires, épuisés et désabusés. La situation dans les prochains mois risque d’être critique.»
Il ne faudra d’ailleurs pas compter sur Fanny Pignon, infirmière intérimaire depuis huit ans. « J’avais dit à Olivier Véran que, s’il m’assurait qu’il nous considérait comme des soignants à part entière, bénéficiant de la prime comme les autres, je me porterais volontaire pour un renfort en Guyane.
Mais, pour lui, nous ne sommes que des mercenaires. Donc la deuxième vague se fera sans moi. »
« Pas de prime, pas de renfort Covid », résume Ludovic Boillon, qui lance une semaine d’actions coup de poing : « J’appelle les soignants intérimaires, considérés comme des salariés du secteur du service et pas pleinement comme des soignants, à n’accepter aucune mission la semaine du 17 au 24 octobre. Partout en France, des services entiers fonctionnent presque exclusivement grâce à leur renfort. Or, sur les 2,8 millions de salariés intérimaires de France, 7 % travaillent dans l’intérim de soins. Il est temps de reconnaître leur travail.»