Comme dans un mauvais film
Economie Les salles obscures accusent une baisse de leur fréquentation de 50% à 70% par rapport aux chiffres de l’an dernier
La tenue du Festival Lumière, cette semaine, et le frémissement observé les vingt derniers jours leur avaient redonné un peu d’espoir. Mais le couvrefeu annoncé va rebattre les cartes. Depuis leur réouverture, le 22 juin, les salles de cinéma sont à la peine. « La reprise est dure, confirme Denis Revirand, de l’institut Lumière. Mais on a eu quelques bulles de respiration avec des films comme Antoinette dans les Cévennes, Tenet et Les choses qu’on dit, les choses qu’on fait qui nous ont permis de moins souffrir. » Les chiffres sont toutefois bien en deçà de ceux de l’an dernier. «L’équilibre est fragile. Avec le confinement, trois mois ont été plantés. Cela a été un coup d’arrêt dans la progression que nous observions depuis 2015 et le rachat des salles CNP », poursuit-il.
Le public a eu le plus grand mal à revenir. Et l’été n’a pas arrangé la situation. « En juin, on a été heureux de retrouver une partie de nos spectateurs mais on a très vite déchanté. Les mois de juillet et août ont été extrêmement compliqués », décrit de son côté Frédérique Duperret, codirectrice du cinéma Le Comoedia. L’établissement a enregistré une baisse de 50 % du nombre de ses entrées par rapport à l’été 2019. « On a perdu des spectateurs, mais moins que les multiplexes qui disposent d’un plus grand nombre de salles et qui dépendent davantage du marché américain. Eux, ont enregistré une baisse de leur fréquentation de 70 % », souligne-t-elle.
«C’est assez violent»
« Nous avons tous joué le jeu, avec un protocole sanitaire strict à mettre en place. Mais nous devons faire face à l’absence de films américains », abonde Marion Sommermeyer, présidente du Grac (réseau des salles arts et essais de proximité) et exploitante du cinéma Le Toboggan, à Décines. La déprogrammation de longs-métrages internationaux très attendus comme le dernier James Bond ou Mort sur le Nil a été vécue comme de nouveaux coups durs. « Certaines salles n’excluent de devoir fermer à nouveau, révèle Marion Sommermeyer. Depuis la réouverture, elles n’ont plus de personnel au chômage partiel, les charges sont revenues alors que les recettes sont divisées par deux. C’est assez violent, d’autant qu’il faut lutter aussi contre les plateformes. » Disney, par exemple, a choisi de mettre en ligne son dernier film, Soul, sur sa plateforme le 25 décembre. Il n’y aura pas de sortie en salle. «On constate que le public a envie de revenir mais si les distributeurs ne jouent pas le jeu, ça sera compliqué », poursuit Marion Sommermeyer.
En attendant, les salles obscures misent sur les productions françaises, les avant-premières et les soirées débats. Du côté des cinémas Lumière et du Comoedia, les dernières séances ont affiché complet même si les capacités d’accueil ont été réduites à 60 %.