20 Minutes (Lyon)

Un besoin de plus en plus pressant

La crise sanitaire a accentué la pénurie de toilettes dans l’espace public. Un phénomène non sans conséquenc­es.

- Delphine Bancaud

Aucun lieu pour se soulager. C’est l’expérience qu’ont faite de nombreux Français depuis le début de la crise sanitaire. Selon une étude Ifop pour Diogène France rendue publique ce mercredi, 45% des Français interrogés disent avoir rencontré un problème d’accès aux toilettes publiques depuis le premier confinemen­t. Une situation due à la fermeture des cafés, des restaurant­s et des centres commerciau­x non alimentair­es. Mais aussi à la fermeture de certains WC publics situés dans les rues.

Un contexte qui met en lumière le sous-équipement chronique des villes dans ce domaine, comme l’a montré le rapport de 2020 sur «Le droit d’accès à des toilettes en France » de l’Académie de l’eau. «Notre pays compte environ 14000 WC publics, soit 1 pour 4 610 habitants. Si Paris compte 1 sanitaire pour 3 000 personnes, Marseille n’en comptait que 1 pour 48000 personnes en 2019», souligne Henri Smets, ingénieur et auteur de l’étude. Selon lui, cette pénurie s’explique par des raisons économique­s : « Le prix total pour construire et installer des toilettes est de l’ordre de 20000 à 40000€ par an par équipement [investisse­ment, entretien, consommabl­es].»

Par ailleurs, aucune législatio­n n’impose aux communes un équipement minimum de sanitaires publics. « Le fait de s’en équiper n’apporte pas beaucoup de crédit politique aux municipali­tés, note Florent Houdmon, directeur régional Paca de la Fondation Abbé-Pierre. Pour certains, on peut se demander s’il ne s’agit pas d’une tentative pour dissuader les sans-abri de rester là.» Un manque de toilettes qui pénalise encore plus ce public-là, mais aussi les enfants, les seniors, les femmes enceintes, les malades chroniques, les chauffeurs de taxi, les livreurs… «Les personnes atteintes de maladies chroniques des intestins ont souvent un besoin urgent d’aller aux toilettes, rappelle Eva Saumier, porte-parole de l’Associatio­n François-Aupetit. La situation actuelle risque d’entraîner des accidents très humiliants ou de les inciter à rester chez elles pour éviter ce risque.»

Face à ce problème de santé publique, des parlementa­ires étaient pourtant montés au front. En 2017, une propositio­n de loi ambitionna­it de rendre obligatoir­e la mise à dispositio­n gratuite de points d’eau et de toilettes publiques pour les communes de plus de 3500 habitants. Adoptée par l’Assemblée nationale, elle a finalement été rejetée au Sénat. «Il faudrait dans un premier temps imposer un nombre minimal de toilettes publiques aux communes de plus de 20000 habitants» estime Henri Smets. Histoire de pallier l’urgence.

« Le prix total est de l’ordre de 20000 à 40000€ par an et par équipement. »

Henri Smets, ingénieur

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Le manque de toilettes peut entraîner des accidents humiliants chez les personnes atteintes de maladies chroniques.

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