« La représentation des femmes change dans les comics»
Dans «Le Règne des superhéroïnes», l’historienne et militante Trina Robbins évoque la lutte pour leur reconnaissance
De Wonder Woman 1984 à Birds of Prey en passant par le phénomène WandaVision et le retour de Marvel en salles avec Black Widow, les superhéroïnes s’imposent en force sur les écrans. Sont également annoncés les séries She-Hulk, Ms. Marvel ou encore le film Batgirl, chez DC Comics. Est-on en train d’assister à un « Règne des superhéroïnes » ? C’est le titre d’un documentaire inédit qui a été diffusé lundi sur Toonami – et disponible à la demande. Trina Robbins, autrice, militante et historienne, 82 ans, y intervient pour évoquer la place des femmes dans les comics.
Si Wonder Woman est l’une des premières superhéroïnes, vous aimez rappeler qu’elle est précédée d’une autre, Miss Fury…
Miss Fury est en effet née avant Wonder Woman, ses aventures ont été publiées six mois avant celles de l’Amazone. C’est une superhéroïne très intéressante, d’abord parce qu’elle est la première créée par une femme, Tarpé Mills. Inspirée par le film noir des années 1940, Miss Fury est l’alter ego de la riche Marla Drake, qui enfile une peau de panthère noire pour rendre la justice. On peut penser un peu à Catwoman.
Toutes les superhéroïnes n’ont pas servi la cause des femmes, et vous prenez l’exemple de Supergirl…
Elle est la cousine de Superman, a les mêmes pouvoirs que lui, mais n’en fait jamais vraiment la démonstration.
Le monde a déjà Superman, il n’a donc pas besoin de Supergirl. Les superhéroïnes, comme les femmes, ont toujours été considérées comme secondaires. Et puis Supergirl, Invisible Girl… Cela a été longtemps les « girls », les filles, dans les comics, pas les «women», les femmes.
Vous avez été la première femme à dessiner Wonder Woman en 1986, et avez même participé à la création de Vampirella en 1969…
C’était très important pour moi de dessiner Wonder Woman, car je l’adore, je l’admire. Je voulais rendre hommage à l’âge d’or des comics. Pour Vampirella, c’est différent, je n’ai pas vraiment collaboré à la création du personnage, j’ai juste trouvé son costume. Un costume qui a évolué avec les âges, et pas forcément dans le bon sens. Elle avait de moins en moins de tissu sur elle. Je n’ai pas aimé ce qu’ils ont fait d’elle, mais je n’avais pas mon mot à dire.
Miss Hulk, Spider-Woman, Jane Foster en Thor… Que pensez-vous de ces versions féminines de superhéros iconiques ?
Je préfère toujours que les femmes aient leurs propres personnages qu’une version féminine de superhéros déjà existants. Pourquoi Miss Hulk ? Pourquoi ne pas faire d’elle une superhéroïne à part entière, avec sa propre identité ?
Quelle superhéroïne trouve aujourd’hui grâce à vos yeux ?
La nouvelle Miss Marvel, Kamala Khan, une adolescente musulmane, est formidable. Et chez DC, il y a aussi Harley Quinn, la farfelue. Je les aime beaucoup toutes les deux. On peut également citer Squirrel Girl et ses pouvoirs foufous. Je suis assez optimiste pour les futures superhéroïnes, car de plus en plus de femmes travaillent dans le comics, en tant que scénariste ou dessinatrice. Elles changent la représentation, mais aussi le dessin lui-même.
« Dans les comics, ça a longtemps été les “girls”, pas les “women”. »