«Il faut un congé paternité bien rémunéré »
Dans son livre, Violaine Dutrop propose d’aller plus loin que le gouvernement
Seulement 70 % des pères profitent de leur congé paternité dans le privé, et moins de 1 % des pères prennent un congé parental à temps plein après la naissance de leur enfant. Le gouvernement a prévu de porter, à partir de juillet, le congé paternité de quatorze à vingt-huit jours, dont sept obligatoires, en comptant les trois jours du congé de naissance. L’exécutif envisage de réformer le congé parental. Pour l’autrice Violaine Dutrop, ce n’est pas suffisant. Elle explique pourquoi dans Maternité, paternité, parité (éd. du Faubourg), qui paraît ce jeudi.
Pourquoi la France est-elle en retard par rapport à ses voisins ?
Au Portugal et en Espagne, les politiques concernant l’accueil du jeune enfant ont été mises en oeuvre pour privilégier l’emploi des femmes, avant de créer de nouveaux droits pour les pères. En France, tout le monde s’accommode du fait qu’une femme sur deux prenne un congé parental, car il n’y a pas assez de modes de garde. Or, seulement 30 % des familles souhaitent s’occuper à plein temps de leur enfant de moins de 3 ans. Plusieurs tentatives de réforme du congé parental ont échoué. Est-ce parce qu’elles ne prévoyaient pas de rehausser son indemnisation ? C’est le principal obstacle. Car elle est de 399 € par mois pour un congé à temps plein. Ce qui pose problème quand le père apporte le revenu principal au foyer. Et cette faible rémunération contribue à dévaloriser la mission parentale aux yeux de la société.
Mais la priorité est d’agir dès la naissance de l’enfant, pour éviter la mise en place des rôles sexués dans la famille. Il faut mettre en place un congé paternité obligatoire, égal au congé maternité et bien rémunéré.
Vous proposez donc un congé deuxième parent de seize semaines, dont huit obligatoires.
Cela faciliterait l’accès à ce congé à tous les hommes qui en auraient envie, sans qu’ils aient besoin de le quémander ou qu’ils en subissent les conséquences professionnellement. Quelle serait l’incidence d’un tel congé sur le rapport père-enfant ? Cela permettrait de fabriquer une autre manière de penser chez les hommes, qui voient leur rôle de père comme secondaire dans la famille. Aujourd’hui, beaucoup sont aspirés par leur vie professionnelle.
Le passage à une semaine de congé obligatoire pour le deuxième parent n’est-il pas le signe que le gouvernement n’ira pas plus loin ? Je pense que le gouvernement estime que c’est une vraie avancée et que la question est réglée. Mais ce dispositif reste très en retrait par rapport à ce que proposait le rapport de Boris Cyrulnik [en 2020], qui préconisait d’étendre la durée du congé paternité à neuf semaines.
« Aujourd’hui, beaucoup de pères sont aspirés par leur vie professionnelle. »