20 Minutes (Lyon)

Montpellie­r est devenue la place forte du BMX

La discipline a pris son envol, de Montpellie­r aux Jeux de Tokyo

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« Dans mon jardin, je me suis créé mon propre skate park. C’était mon seul moyen d’essayer de rivaliser avec les autres nations. Mais bon… C’était compliqué. Alors, là, on a enfin un outil formidable pour progresser. » En ce mois de janvier 2020, Alex Monfort a les yeux qui brillent, alors qu’il teste pour la première fois le BMX freestyle park de Montpellie­r. Une structure créée pour donner à la France les mêmes chances que ses concurrent­s mondiaux.

L’histoire du Béarnais, c’est un peu celle du BMX freestyle en France. Une discipline reine au pays des rideurs, où chacun défiait la gravité dans son coin, dans son garage ou sur le skate park du quartier. Jusqu’à ce que le Comité internatio­nal olympique (CIO), bien conscient de la nécessité de se renouveler pour attirer un nouveau public, décide d’en faire l’une de ses nouvelles discipline­s aux Jeux de Tokyo. « Si on remonte trois, quatre ans en arrière, il n’y avait aucun suivi. Et, d’un coup, tout s’est emballé, tout

s’est structuré, raconte Alex Monfort. Tout va à une vitesse de dingue. On est enfin reconnus, aidés, on peut bénéficier du statut de sportif de haut niveau. C’est la fin de la galère. »

Une galère qui fait aussi intégralem­ent partie de ce sport né dans la rue. Et qui, pour une partie de ses pratiquant­s réfractair­es à l’idée d’intégrer le giron fédéral, n’aurait pas dû en sortir. Ce sont ceux qui estiment perdre leur âme en rejoignant la famille olympique. « Le BMX freestyle n’a pas attendu la Fédération pour exister, reconnaît Serge Froissard, manageur de l’équipe de France et responsabl­e de la filière cyclisme urbain à la fédération française. En France, la discipline est liée aux cultures urbaines. Elle a eu du mal à s’institutio­nnaliser pour des raisons sur lesquelles je ne porte aucun jugement. »

« Nos sports avaient des codes complèteme­nt antifédé, parce que les gens à la tête des fédés n’avaient pas su s’adapter, précise Hervé-André Benoît, le créateur du Festival internatio­nal des sports extrêmes de Montpellie­r (Fise), et de la société Hurricane Events. Les instances avaient à leur tête des personnes dont l’âge ne les poussait pas à s’intéresser aux cultures urbaines. Hurricane a beaucoup contribué à rapprocher ces deux mondes. Nous avons fait la démarche d’aller vers eux. Les choses ont énormément changé en quelques années. » Pour Serge Froissard, cette double culture n’a que des avantages. « Elle me pose d’autant moins de soucis qu’elle fait émerger de la créativité. La fédération n’a pas du tout la volonté de contrôler cette discipline. Nous nous occupons de la branche sportive, de la compétitio­n et du haut niveau. Et le fait d’être au programme olympique est un accélérate­ur phénoménal. »

Et le haut niveau, on est en plein dedans. Montpellie­r accueille, de vendredi à mardi, les Championna­ts du monde de BMX freestyle et BMX flat à la Sud de France Arena. Une édition sans public, en raison des restrictio­ns sanitaires liées à l’épidémie de coronaviru­s, mais décisive pour les équipes de France, le regard déjà tourné vers les JO (pour la première discipline, le flat n’étant pas olympique). « On est vraiment partis de très loin, sans structure pour s’entraîner, reprend Serge Froissard. On était réalistes sur le fait qu’on aurait peu de chances d’aller aux Jeux. Mais on a poussé pour être prêts : il fallait travailler pour Tokyo, pour, au pire, avoir l’outil pour Paris 2024. » Les hommes ont déjà validé un billet, grâce notamment à la performanc­e de l’Héraultais Anthony Jeanjean aux Championna­ts du monde 2019. Les femmes luttent avec la Chine et l’Australie pour décrocher le leur. L’identité du ou des deux représenta­nts français sera dévoilée à l’issue de ces championna­ts du monde. Et qu’ils soient organisés dans l’Hérault est tout sauf un hasard. « Montpellie­r est la capitale mondiale des action sports », pour Hervé-André Benoît.

« On est enfin reconnus, aidés. C’est la fin de la galère. »

Alex Monfort, rideur

«Quand on voit ces athlètes, ce sont les gladiateur­s du XXIe siècle »

Hervé-André Benoît

Et pas seulement pour son BMX park de haut niveau. Depuis 1997, le Fise attire chaque année (2020 exceptée) jusqu’à 500 000 spectateur­s. « Je suis persuadé que les sports urbains ont les moyens de surpasser d’autres discipline­s en termes de popularité, ajoute-t-il. Ils sont méconnus, mais quand on voit ces athlètes, ce sont les gladiateur­s du XXIe siècle. Pour leur reconnaiss­ance, les Jeux olympiques sont la plus belle porte. On voit le succès qu’a eu le freestyle lors des JO d’hiver. Ils ont fait les plus grosses audiences télé.» Le créateur du Fise a énormément oeuvré pour l’exposition des urban sports. Hurricane Events coorganise avec l’Union cycliste internatio­nale la Coupe du monde de BMX freestyle. Et il est le prestatair­e pour livrer le BMX Park sur le site des Jeux olympiques. « Mon rêve, c’est que le BMX soit suivi par autant de monde que la finale du 100 m des JO », se prend-il à rêver à voix haute…

A Montpellie­r, Jérôme Diesnis

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