20 Minutes (Lyon)

« Aujourd’hui, je veux rassembler les gens et jouer pour tous les rêveurs »

- Propos recueillis par Claire Planchard

C’est un des guitariste­s les plus talentueux de sa génération. À 36 ans, Thibault Cauvin a déjà joué dans plus de 130 pays et certaines des salles de concert les plus prestigieu­ses. Pourtant, le grand public français ne l’a découvert qu’avec son dernier album, Films.

Les concerts reprennent après plus d’une année de restrictio­ns. Quel est votre état d’esprit ?

J’ai donné mon premier concert quand j’avais 12 ans. Depuis, je n’avais jamais passé un mois sans en donner.

Aujourd’hui, je suis hyper heureux que ça reparte. J’ai l’impression que chaque spectateur est un ami proche et que je le retrouve après ne pas l’avoir vu pendant un an.

Pendant le confinemen­t, vous avez trouvé, grâce aux réseaux sociaux, un moyen de continuer à partager votre musique…

À l’époque, je me suis dit que j’allais jouer et partager, chaque jour, une des 30 petites pièces de Leo Brouwer, un grand compositeu­r cubain. Je pensais alors que le confinemen­t allait durer trente jours ! Pour accentuer le côté jeu, j’ai proposé de défier deux guitariste­s que j’aime bien. Ça a pris des proportion­s folles. Il y a presque des milliers de versions venant du monde entier, de grands guitariste­s et des amateurs. Des personnes m’ont écrit en me disant : « Je n’avais pas touché la guitare depuis dix ans. Ça a été l’occasion de rejouer les pièces. » C’était très beau.

Comment est née l’idée du disque Films ?

C’est un projet qui date d’un certain temps, bien avant le confinemen­t. L’idée était de remanier, avec mon jeu et ma guitare, les plus grandes musiques de film. Cette envie est en moi depuis que je suis petit garçon. Mon père est guitariste ; toute la journée, je jouais avec lui. Le soir, ma mère me racontait des histoires, des contes et légendes du bout du monde ; j’adorais ça. Le lendemain, quand je reprenais ma guitare, je me faisais des films dans ma

tête avec la musique, je jouais les histoires que m’avait racontées ma mère. Ça m’est resté encore maintenant.

Vous vous êtes aussi mué en « DJ guitariste classique » avec un dispositif de pédales d’effets. C’est grisant, de pousser les limites de son instrument classique ?

Oui, complèteme­nt. Je joue avec la technique de la guitare classique, qui existe depuis des siècles et, en même temps, je suis connecté à tous ces effets très actuels. Il y a eu un gros travail de recherche sur les sons. C’était passionnan­t. En plus, le confinemen­t a fait que l’équipe qui m’entourait, les ingénieurs du son, les arrangeurs, avait beaucoup de temps. Je ne me suis jamais autant amusé que sur ce disque-là.

Dans votre jeunesse, vous avez eu une approche très compétitiv­e. Avec un dispositif que vous maîtrisez moins, vous cherchez ce même frisson ?

Pour être sincère, ce nouveau dispositif est très difficile à mettre en place. Je travaille comme un fou, parce que jouer aussi avec les pieds demande au cerveau de se dédoubler. Mais ce n’est pas avec une approche de compétiteu­r : ado, en effet, j’ai adoré l’adrénaline, repousser les limites. Aujourd’hui, je veux plutôt rassembler les gens et jouer pour tous les rêveurs.

Avec Films, essayez-vous de faire tomber les préjugés autour de la guitare classique ?

« Je travaille comme un fou, parce que jouer aussi avec les pieds demande au cerveau de se dédoubler. »

Tout à fait, même si ce n’est pas forcément conscient, parce que cette envie de faire tomber les frontières est profondéme­nt ancrée en moi. Avec la musique, c’est pareil. J’ai étudié au conservato­ire avec une approche de musicien classique de haut niveau et, à côté, mon père était un rockeur avec des musiques très électrique­s. Et puis je suis un gars d’une trentaine d’années, au XXIe siècle. Il y a simplement une envie d’être dans mon temps.

Le 30 juin, les dernières restrictio­ns sanitaires devraient être levées. Quel serait votre été postconfin­ement rêvé ?

Aller au restaurant, embrasser tout le monde, voyager, faire aussi du surf… et, bien sûr, les concerts ! Je suis en train de préparer une tournée autour de ce disque, Films. Elle commencera en octobre. Nous avons déjà une date à Paris, à La Cigale, en mai 2022. Il y aura plein d’autres concerts en France et à l’étranger. Mon souhait est de proposer un grand spectacle qui soit une expérience. J’ai vraiment envie que cette tournée célèbre la liberté et le rêve. J’espère qu’elle va durer deux cents ans !

 ?? O. Juszczak / 20 Minutes ?? Le musicien français de 36 ans a déjà joué dans plus de 130 pays.
O. Juszczak / 20 Minutes Le musicien français de 36 ans a déjà joué dans plus de 130 pays.

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