L’Eglise remet de l’ordre
Près de 90 victimes se sont manifestées auprès des autorités religieuses catholiques
Alors que les évêques de France sont réunis à Lourdes, l’Eglise tente de s’attaquer au fléau de la pédophilie. Ces derniers mois, près de 90 victimes présumées se sont signalées auprès de l’institution catholique.
Une messe pour « le pardon des péchés ». Un jeûne en guise de déjeuner. Et des vêpres durant lesquelles « résonnera le souvenir des victimes ». Réunis à Lourdes (HautesPyrénées) en assemblée plénière, les 120 évêques de France doivent, à la demande du pape, consacrer leur journée de lundi à la pénitence et à la prière en mémoire des victimes d’actes de pédophilie.
Des cellules d’écoute créées
Un cérémonial qui vient à la suite de mois de scandales qui ont secoué l’Eglise catholique, particulièrement dans le diocèse de Lyon (Rhône) où le cardinal Philippe Barbarin a été accusé d’avoir « couvert » les agissements de plusieurs prêtres pédophiles. « Il y a six mois, l’Eglise demandait de prier pour Barbarin. Aujourd’hui, elle demande de prier pour les victimes, se félicite Bertrand Virieux, lui-même abusé durant son enfance et cofondateur de l’association de victimes La Parole libérée. Les choses évoluent. » L’Eglise doit d’ailleurs profiter de cette assemblée pour faire « un point d’étape » sur les mesures mises en place, depuis avril, pour lutter contre la pédophilie en son sein. Selon nos informations, environ 90 victimes se sont manifestées par le biais de la boîte email* ouverte il y a six mois. La grande majorité d’entre eux – parfois sous couvert d’anonymat– y ont relaté des faits d’abus anciens, certains remontant même aux années 1940. « La plupart de ces faits étaient déjà connus et judiciarisés, assure Ségolaine Moog, responsable de la Cellule de lutte contre la pédophilie à la Conférence des évêques de France. Mais nous avons eu quelques révélations. » Pour chacune d’entre elles, un signalement a été fait à la justice. L’Eglise assure aussi avoir pris des « mesures conservatoires » à l’encontre de « quelques » religieux, sans vouloir en dévoiler le nombre précis. Psychologues, prêtres, associations : si les intervenants varient d’un endroit à l’autre, des cellules d’écoutes ont été mises en place dans tous les diocèses. « Même si les faits d’abus sont déjà connus, les victimes ont besoin de parler et surtout d’avoir le sentiment d’être écoutées », résume le père Laurent Berthout, qui s’occupe de la cellule de Bayeux (Calvados). « Il a fallu se battre pendant dix ans, mais je pense que l’on peut difficilement être pédophile dans l’Eglise aujourd’hui », admet Bertrand Virieux.