Les tags sont les meilleurs amis de la reconnaissance faciale sur Facebook
Le réseau social ne cesse d’améliorer ses capacités de reconnaissance faciale
P.16
De retour de vacances à Nansles-Pins avec des amis, vous publiez quelques photos et y « taguez » vos proches, par réflexe. Vous permettez ainsi aux amis de vos amis d’y avoir accès. Mais vous rendez aussi service à Facebook : vous ajoutez quelques données à la base déjà astronomique que détient le réseau social. Et vous lui permettez d’affiner, mois après mois, son système de reconnaissance faciale.
De plus en plus puissant
Le 2 février, Facebook annonçait l’arrivée de Lumos, une nouvelle plateforme qui permet de retrouver une photo même si celle-ci n’a pas été taguée ou identifiée par des mots-clés. Il suffit de la décrire en quelques mots (« chat », « chapeau de paille »). Entraînée sur « plus de 130000 photos publiques, partagées sur Facebook et comprenant des personnes » (environ 350 millions de photos sont envoyées chaque jour), l’intelligence artificielle (IA) est capable de reconnaître les éléments d’une image (lieux, objets, monuments, animaux ou action, comme « une personne qui court »…). « Imaginez que vous preniez un selfie dans un lieu public. Un aéroport ou une gare. Des centaines de personnes sont présentes, certaines font face à la caméra. Devinez quoi : l’intelligence artificielle de Facebook vient de les repérer [en reconnaissant leur visage] », écrit Alex Yumashev, fondateur de JitBit et hacker, dans un article du 3 février posté sur Medium : « Facebook est terrifiant ». Certes, les visages repérés dans une foule sont bien plus difficiles à exploiter qu’une photo de profil Facebook.
« Ces données biométriques sont associées les unes aux autres. »
Nicolas Bénoit, avocat
Au-delà de la peur de Big Brother, notre visage (une donnée biométrique) peutil être exploité sans protection ? L’arsenal juridique français est protecteur, mais n’empêche rien dans les faits. La Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) considère que l’utilisation
des données doit faire l’objet d’un consentement de l’utilisateur. Jusqu’en 2012, un outil de Facebook proposait automatiquement les noms des personnes figurant sur vos photos. Il a depuis été désactivé en Europe. Pour l’avocat spécialiste des nouvelles technologies Nicolas Bénoit, « le problème n’est pas tant que l’utilisateur donne à Facebook toutes ses photos, mais le stockage de toutes ces données biométriques associées les unes aux autres ». Le tag associe formellement à un visage le nom d’une personne. Il résout donc le problème no 1 de l’apprentissage d’un algorithme : la difficulté qu’il y a d’étiqueter l’immense somme de données qu’il doit analyser. Une fois plusieurs photos d’une même personne récoltées, l’IA peut extraire automatiquement les traits de son visage, sans douter un seul instant qu’Albert soit bien Albert. En attendant que Facebook soit confronté à ses obligations, un premier réflexe peut être adopté, celui de ne « jamais taguer » les photos que vous postez.