Macron devra bien conclure
Des éditoriaux élogieux, une passation de pouvoirs commentée avec emphase, des sondages positifs sur les premières mesures promises lors de son quinquennat… Depuis son élection, le nouveau président de la République semble jouir d’un état de grâce. « Il y a toujours une suspension des hostilités au lendemain d’une élection présidentielle », indique l’historien Fabrice d’Almeida. Ses prédécesseurs, eux, n’avaient pas suscité un tel enthousiasme, rappelle le spécialiste d’histoire politique, Jean Garrigues : « Sarkozy avait commis l’erreur du Fouquet’s et avait donné l’impression de privatiser la passation de pouvoirs en mettant en scène de manière excessive sa famille. Quant à Hollande, il n’avait pas raccompagné Sarkozy jusqu’à sa voiture lors de la passation de pouvoirs. Il lui avait même tourné le dos et avait rendu hommage à tous ses prédécesseurs dans son discours d’investiture, sauf à lui. »
« Il aura à transformer cette idylle avec les Français en amour plus durable. » Jean Garrigues, historien politique
Si le président de la République jouit, pour l’instant, d’un traitement positif dans l’opinion, c’est aussi qu’il semble porteur d’un souffle : « Il incarne la nouveauté, la volonté de casser les codes et cela suscite la curiosité », estime Patrick Eveno, historien des médias. Outre le coup de jeune qu’il donne à la présidence, Emmanuel Macron paraît incarner l’espoir pour beaucoup, d’autant qu’il succède à François Hollande dont la cote de confiance était très basse en fin de quinquennat : « Certains voient en lui un repoussoir du déclinisme, un rayon de soleil dans cette grisaille politique. Et cet état de grâce semble encore amplifier par la sympathie qu’il inspire à l’international, comme on a pu le constater avec le soutien que lui a apporté Barack Obama », complète Jean Garrigues. Si Emmanuel Macron n’est pas encore égratigné par la plupart des médias, c’est aussi que son positionnement « ni à droite ni à gauche » déstabilise : « Il bénéficie pour l’instant d’une certaine neutralité de la part de la presse la plus partisane », constate Jean Garrigues. Et de souligner par ailleurs que la presse a exploité le filon du storytelling : « Tous les portraits de lui font appel au romanesque, y compris dans l’évocation de son couple atypique. » Mais toutes les lunes de miel ont une fin, glisse Patrick Eveno : « Les critiques de Le Pen et de Mélenchon vont se faire de plus en plus entendre lors de la campagne des législatives et seront suivies par celles des médias. » « Il aura à transformer cette idylle avec les Français en amour plus durable », juge Jean Garrigues. « Tout ce qui a été jugé positif chez lui pourrait finalement être critiqué », avance Fabrice d’Almeida.