Immeubles
Un architecte déplore un « manque de surveillance »
Fabien Cadenel est architecte à Marseille. Il conseille plusieurs syndics sur la rénovation d’immeubles.
Quelles sont les particularités de ces immeubles marseillais ?
Il s’agit d’immeubles de type « trois fenêtres ». Ils datent de la fin du XVIIIe siècle, à une époque de grande croissance. Il fallait construire vite. Ils s’articulent autour de deux murs porteurs, reliés par des poutres de sept mètres utilisées dans la marine, sans mur intermédiaire. Les murs sont faits de moellons, de gros cailloux, agrémentés par un mortier de chaux, qui peut se désagréger dans le temps.
Est-ce que ces immeubles présentent des risques dans le temps ?
Non, ils vieillissent bien, à condition d’être bien entretenus. Si l’enduit ou la toiture se dégradent, l’immeuble est exposé aux aléas météorologiques et l’eau va s’y infiltrer. Les murs vont se désolidifier et le bois peut s’affaisser. L’élargissement de certaines pièces, ou de fenêtres, va aussi fragiliser l’ensemble. C’est le cas des commerces du rez-dechaussée qui élargissent leur vitrine, ce qui va affaiblir les murs.
Est-ce que ces immeubles sont généralement bien entretenus ?
A chaque assemblée générale de copropriétaires, je dois leur rappeler que l’entretien coûte de l’argent. Il y a une fâcheuse tendance à ce que les copropriétaires considèrent ne pas avoir besoin d’entretenir. Il y a un vrai manque de surveillance. Ils sont souvent la 3e ou 4e génération de propriétaires et doivent engager des travaux très lourds, donc très onéreux. Ils sont importants par rapport au revenu locatif, certains n’ont pas les moyens de réaliser ces travaux. A titre d’exemple, j’ai un devis de 145 000 € pour cinq copropriétaires, vous imaginez ? Beaucoup parlent de marchands de sommeil, mais j’en rencontre très peu.
Comment remédier à ce problème ? Les travaux doivent être menés sous l’égide d’un homme de l’art, or ce n’est souvent pas le cas. Des petits travaux peuvent avoir de grandes conséquences. Il y a souvent une absence de programme de rénovation. Ça ne peut donc que se dégrader et le coût ne cesse d’augmenter. Nous devons être épaulés par une volonté plus large. Cette catastrophe malheureuse fait resurgir cette nécessité, d’autant plus importante à Marseille qu’ailleurs.