Accidents
Les « Lieutaud », un scénario à répétition
Ils sont si récurrents qu’ils en sont devenus une adresse. Et même une expression : les « Lieutaud ». Chaque année, Marseille voit son lot d’accidents sous le pont du cours Lieutaud, l’une des artères traversantes de la ville. Le même scénario se répète : un camion trop haut se retrouve coincé, au mieux, sous ce pont métallique classé. En 2019, il n’aura fallu attendre que trois jours pour que le premier « Lieutaud » se produise. Le 3 janvier, un camion est resté bloqué sous le pont. Cathy, vendeuse au magasin d’articles de fête Viva Samba, est aux premières loges de ce dangereux spectacle. « Je suis ici depuis trente ans, et je peux vous dire que j’en ai vu d’innombrables. J’ai même vu un camion de l’armée se renverser avec un missile », se remémore-telle. Heureusement, aucun accident grave n’a été à déplorer.
Même si la catastrophe n’est, parfois, pas passée loin. « Un jour, j’ai vu le camion arriver droit sur moi. Son nez a fini dans la vitrine, en explosant les mannequins », explique Cathy. « Ça fait longtemps que les responsables politiques doivent s’en occuper, jusqu’au jour où… », ajoute-t-elle. Pour l’instant, elle et sa collègue préfèrent dédramatiser. « Quand on dit qu’on est sous le pont du cours Lieutaud, nos clients nous répondent : “Ah oui, là où les camions s’encastrent !” » Saïd, employé du garage de l’autre côté de la rue, n’en rigole pas encore. Il ne travaille ici que depuis un an et demi, mais a déjà connu « au moins six ou sept “Lieutaud”». Il a rapidement identifié le problème : « La hauteur est suffisante sur les voies du milieu, mais les chauffeurs passent sur la droite où le pont est plus bas, à cause de l’arrondi. »
La métropole a conscience de ce problème « récurrent ». Mais elle explique avoir fait le nécessaire en matière de signalétique : « Des gabarits de part et d’autre de l’ouvrage ont été installés, ainsi qu’une signalétique en amont interdisant les poids lourds. » Saïd et Caroline – qui travaille dans l’assurance voisine du garage – partagent le même constat : « La plupart du temps, il s’agit de chauffeurs étrangers. Ils ne doivent pas voir la signalétique ou ne la comprennent pas.» Pour Caroline, «c’est hallucinant de ne jamais avoir eu de blessé. Quand ils roulent à fond, ils se retournent et encastrent les voitures stationnées. »
Les travaux de requalification du cours Lieutaud, prévus pour cette année, devraient néanmoins régler le problème ponctuellement. « Seules les deux voies centrales seront accessibles aux véhicules», détaille la métropole.
«J’ai même vu un camion de l’armée se renverser avec un missile.» Cathy, de Viva Samba