La bataille de chiffres des politiques sème le doute en ville
Coronavirus Elus marseillais et ministre de la Santé se livrent une bataille de chiffres qui sème le doute sur la réalité de la situation
« Je demande au gouvernement dix jours, avant la mise en place de nouvelles mesures. Si, à la fin de la semaine prochaine, les indicateurs repartent à la hausse, nous serons prêts à prendre les décisions qui s’imposent. » D’un côté, ce jeudi, Benoît Payan, premier adjoint (PS) à la maire de Marseille, a fait part de son incompréhension, alors que la situation épidémiologique « peut s’améliorer dans les jours à venir » au regard de statistiques « encourageantes ».
« Les chiffres officiels du ministère de la Santé indiquent que le pic de cette phase de l’épidémie a été atteint dans la semaine du 3 au 9 septembre », affirme ainsi le socialiste, qui réclame «une sérénité scientifique, qui s’appuie sur des chiffres concrets, […] pas sur des opérations de communication ministérielle.» De l’autre côté, dans cette étrange bataille de chiffres entre Marseille et Paris, le ministre de la Santé, Olivier Véran, a placé la métropole d’Aix-Marseille en « zone d’alerte maximale » pour le coronavirus, Le gouvernement ne donne toutefois jamais de chiffres précis et récents sur la situation marseillaise. Contactée par 20 Minutes, l’agence régionale de santé de la région Provence-AlpesCôte d’Azur n’a pas été non plus en mesure de nous les communiquer. «Le taux de positivité ne fait que reculer », plaide Benoît Payan.
«Nous manquons de recul»
« De façon extrêmement récente, sur les trois ou quatre derniers jours, le taux a légèrement diminué, tout en restant très supérieur au taux national, reconnaît Pascal Auquier, professeur d’épidémiologie à l’université d’Aix-Marseille et à l’Assistance publique des hôpitaux de Marseille (APHM). Et les gens sont en train d’expliquer que l’épidémie est finie. Mais en trois jours, on n’a pas assez de recul ! » Surtout, une vraie problématique se pose dans les hôpitaux marseillais. « On est à saturation, se désole Laurent Zieleskiewicz, chef adjoint du service d’anesthésie réanimation de l’hôpital Nord de Marseille. On arrive à la limite de l’optimisation et on veut absolument tout faire pour éviter une déprogrammation. » Selon nos informations, jeudi, en milieu de journée, l’AP-HM avait ouvert 212 lits Covid, contre 139 lits il y a quinze jours. Or, ce jeudi toujours, 40 des 45 lits de réanimation à disposition des patients atteints du Covid-19 étaient occupés. Une situation urgente et très tendue qui a poussé Benoît Payan à interpeller le gouvernement, en guise de conclusion de sa conférence de presse. « Ouvrez des lits, ne fermez pas les restaurants ! », réclame l’adjoint au maire. Car, comme le rappelle Pascal Auquier, « les gens qui sont contaminés aujourd’hui vont en partie arriver dans les services de réanimation dans dix à quinze jours. »