Vendée Globe
Entre exaltation et fatigue extrême, le sprint final se dessine comme «un super match» pour l’avant de la flotte
Difficile de faire plus symbolique. Au pointage de jeudi matin, Charlie Dalin, Damien Seguin et Thomas Ruyant, alors respectivement 2e, 3e et 4e du Vendée Globe, se tenaient en à peine 2 milles (environ 3 km), après une descente de l’Atlantique et la traversée complète de deux autres océans. «On est sur une édition un peu particulière, admet le directeur de course, Jacques Caraës. On n’aurait pas imaginé avoir un peloton aussi serré sur le retour dans l’Atlantique. »
Une explication majeure à cela : les systèmes météo, notamment ceux des mers du Sud n’ont, à aucun moment, créé des conditions de mer plate propices au décollage des foilers et donc aux gros écarts. Si bien que, ose le lauréat de 2004-2005, Vincent Riou, « on peut tout à fait se retrouver avec un bateau à dérive sur le podium aux
Sables-d’Olonne ». En bon vétéran, Vincent Riou recommande à ses pairs de ne pas en faire trop, sous peine de sombrer dans un burn-out fatal à l’heure du sprint final : « Il faut réussir à trouver des moments pour s’enlever un peu la pression de la compétition, se détacher de la course, parce que sinon tu t’épuises et ça, c’est très dur à faire quand il y a du monde autour vu qu’on est formatés pour la compétition. » Difficile mais indispensable de jouer contre-nature, quitte à faire un roupillon pour retrouver des forces en vue de manoeuvres à venir.
«Garder la tête froide»
De toute façon, si les marins ne vont pas vers lui, Morphée vient inlassablement à eux. Yannick Bestaven en sait quelque chose : en début de semaine, le leadeur du Vendée Globe s’est endormi en oubliant de mettre son réveil. Coup de bol ou plutôt coup double, il a repris dans cette affaire 40 milles à Charlie Dalin et quelques forces. «Il y a des sections où il faut être capable de se dire : là, il ne va pas se passer grand-chose, j’oublie un peu le truc, je me repose, poursuit Vincent Riou. Quelques heures seulement, c’est jamais très long, mais c’est nécessaire. »
Une donnée que semble avoir parfaitement intégrée Yannick Bestaven, lequel se sait sous la menace d’un retour gagnant du tandem Dalin-Ruyant, d’après les dernières estimations. « Il ne faudra pas stresser, il faudra garder la tête froide, parce que je vais reperdre beaucoup », a prévenu le marin rochelais, lequel s’attend à « 24-48 heures difficiles ». Garder la tête froide sera un vrai défi d’ici la fin de la remontée de l’Atlantique. Et pas que pour Bestaven. Derrière, le peloton est si homogène qu’on peut très bien passer de la 4e à la 10e place, et vice versa. « Dans la tête des marins, faire 4 ou 12 ce n’est pas du tout pareil, conclut Vincent Riou. Il y en a qui vont se mettre beaucoup de pression, parce qu’ils n’imaginaient pas pouvoir jouer ces places-là. On va voir des mecs qui vont tout donner, prendre des risques et des gamelles, faire des trucs d’enfer. Ça va donner un super match. »