« La banlieue, c’est une culture, un imaginaire »
Dans «La Banlieue du turfu», publié ce jeudi, Makan Fofana fait émerger de nouveaux possibles pour la périphérie
Apprenti magicien, explorateur du « turfu »… Makan Fofana, qui publie La Banlieue du turfu (Tana éditions) ce jeudi, déconstruit la mythologie de la banlieue pour réenchanter la culture quartier, à travers le design fiction, la SF et la pop culture.
Comment voyez-vous le futur des quartiers ?
Pour moi, la banlieue, c’est avant tout une culture, un imaginaire, un partage du sensible et des modes d’être.
Il était important d’utiliser « turfu », car le futur se crée dans un environnement culturel. Le futur dont je parle prend racine dans la culture quartier, qui discute avec d’autres types de cultures, qui, elles-mêmes, discutent avec un imaginaire occidental. Quand j’ai conceptualisé la banlieue du turfu, je n’ai pas modélisé son image, je ne suis pas Le Corbusier. Mais, à force de travailler sur le sujet, vous avez forcément formé une image de cette banlieue, laquelle ? Ce serait un mélange de Wakanda [pays africain fictif de l’univers Marvel], de Silicon Valley, mais aussi de ce qu’on voit en Malaisie. Un assemblage hétéroclite de plusieurs villes futuristes, sans pour autant ressembler à Dubaï. Pour moi, le turfu de la banlieue va commencer dans une chicha où les gens viennent de différentes villes, banlieues ou non, et prennent du plaisir.
Vous avez fondé l’Hypercube, un laboratoire pour explorer la banlieue du turfu à la Gaîté-Lyrique (Paris, 3e)… L’Hypercube est un travail collaboratif qui vise à déconstruire la vision sociologisante du monde et de la banlieue. Avec les lycéens du 94, on a élaboré deux fictions pour repenser la banlieue. Ils ont imaginé un monde où tout coûte 1 € pour régler le problème de l’argent. La banlieue du turfu montre que l’argent n’est pas le problème, il faut de l’imagination.
La crise du Covid-19 a-t-elle remis en question votre façon de voir le futur ? En parallèle des récits pessimistes dans lesquels la banlieue subit plus que les autres, le discours qui parle de la banlieue comme d’un lieu de créativité émerge. Le Covid-19 est une opportunité de participer à la construction du monde d’après et d’avoir de la place.