« La transidentité ne suffit pas à résumer une personne », estime le comédien Océan
Dans la saison 2 de sa websérie documentaire, sous-titrée « En inflitré.e.s », Océan a recueilli les témoignages de personnes trans, intersexes ou non binaires
En 2019, Océan racontait sa transidentité et le début de sa transition dans les dix épisodes de sa websérie documentaire, disponible sur France TV Slash. Depuis jeudi, le comédien et réalisateur poursuit son récit avec une nouvelle saison sous-titrée En infiltré.e.s.
Dans la saison 1, vous racontiez les débuts de votre parcours de transition. Dans cette saison 2, vous allez à la rencontre d’autres personnes trans, intersexes ou non binaires. Y a-t-il une continuité ?
Oui, c’est, d’une part, la suite de mes aventures. Il m’a semblé plus intéressant de parler de ce qu’il se passe quand on est féministe radical comme moi, et qu’on a un « passing », c’est-àdire qu’on se retrouve à être perçu comme un homme cisgenre [ non trans] dans l’espace public. Mais j’avais surtout envie de montrer qu’il y a plein de parcours différents, d’autres vécus, que la transidentité ne suffit pas à résumer une personne.
Dans l’un des épisodes, Sorour, artiste non binaire, vous fait d’ailleurs part de ses critiques au sujet de cette première saison…
Sorour me dit : « Je me suis senti invisibilisé dans tout ce que tu étais visible. » Je trouve son reproche intéressant. En réalité, je n’y suis pour rien, dans le sens où ce n’est pas moi qui fais la loi sur les médias. Ils aiment avoir un exemplaire, le plus rassurant. J’ai gardé ce passage, parce que c’est bien de montrer que ce n’est pas parce qu’il y a un trans visible que tout le monde va être content. Cela peut être aussi une forme d’invisibilisation d’autres parcours, de personnes plus précaires, non blanches, non françaises, non binaires.
Le fait d’écouter ces reproches et de faire son autocritique, cela participe au travail dit de « déconstruction » dont vous parlez en fil rouge de cette saison. Par exemple, vous reconnaissez vous-même avoir intégré des préjugés grossophobes…
On baigne dans une culture grossophobe, raciste, sexiste, validiste [faite pour les personnes valides]. Si on n’est pas concerné, on intériorise tout cela, malheureusement. Et ce n’est pas parce que l’on est concerné par une discrimination qu’on est parfait. Dans cette saison, j’ai tendance à me ridiculiser en forçant le trait de mon personnage dans mes maladresses. Les gens qui regardent peuvent s’identifier à moi, avec leurs préjugés : il y a quelque chose d’assez doux, bienveillant, c’est un processus de déconstruction collective.
Vous évoquez plusieurs notions, telles que le privilège blanc, qui peuvent faire figure d’épouvantail, notamment dans la période actuelle, très crispée. C’est délicat de faire de la pédagogie sans s’aliéner une partie du public ?
On n’est pas dans un truc de donneur de leçons. On s’attache à des personnes qui sont hyper émouvantes et ne font que raconter ce qu’elles vivent. C’est pédagogique, mais pas didactique, c’est- à- dire qu’on n’est pas là à expliquer comment se comporter ou ce qu’il ne faut pas dire. On a juste des personnes qui témoignent de leur propre parcours, et c’est ça qui est le plus efficace, je pense. Les témoignages suscitent une empathie qui permet de faire un travail sur soi.
« On n’est pas là à expliquer comment se comporter ou ce qu’il ne faut pas dire. »