Coup de chaud sur les prix des fruits de l’été
Les gelées tardives ont gêné l’agriculture : les grossistes se tournent vers l’Espagne et les prix des fruits s’envolent
C’est la catastrophe pour tout le monde », résume Nicolas Savier, arboriculteur installé à Mazan, au pied du mont Ventoux. Sur ses 20 ha de cerisiers, il enregistre 95 % de pertes. « On est descendu à -6,5 °C en avril pendant quelques nuits », rappelle-t-il. Et après avoir brûlé pour 10 000 € de bougies, il a décidé « d’arrêter les frais. Dans ces conditions, en dessous de -5 °C, il n’y a rien à faire », regrette-t-il. Mendy Montolin, sa voisine d’exploitation, qui cultive également des abricots et des figues sur 17,5 ha, « a tout perdu ». Pour alimenter son magasin de vente directe, elle achète les quelques cerises restantes à ses voisins pour les vendre à 8 € le kg, « contre 4 € d’ordinaire ».
Une situation qui se répercute dans tous les magasins, où le prix des fruits d’été s’envole. Stéphane Guy travaille pour Jeanningros, un grossiste du marché d’intérêt national des Arnavaux, à Marseille. « C’est très compliqué de vendre du produit français. Les prix sont très hauts, environ 30 % plus chers et il y a peu de volume. » Sans surprise, cette année encore davantage, « les gens se tournent vers l’Espagne pour l’approvisionnement », remarque ce grossiste dont le chiffre d’affaires annuel dépasse les 30 millions d’euros. À catégorie équivalente, les prix varient du simple au double. Ainsi, par exemple, le kilo de cerises espagnoles de catégorie 1, calibre 26 mm, se vend à prix grossistes à 3,71 € hors taxes contre 8,28 € pour les françaises, selon des données de FranceAgrimer, établissement public rattaché au ministère de l’Agriculture. En 2020, à pareille époque, ces mêmes cerises se négociaient à 4,12 €.
« Des soucis climatiques récurrents »
Dans une étude publiée mi- juin, Agrest, le service des études statistiques du ministère de l’Agriculture, fait un gros plan sur la production d’abricots. La production de cette année s’annonce pour la France comme « la plus faible depuis au moins quarante-six ans », prévoient les auteurs de l’étude.
Après les gelées, politiques et représentants des pouvoirs publics s’étaient déplacés sur différentes exploitations pour apporter soutiens et promesses. Déjà touchée pour le gel l’an dernier, Christine Chaix, installée du côté de Manosque, dit « avoir reçu ce mois 40 % du montant de l’aide accordée pour l’an dernier ». « C’est très long, vous avez le temps de ne plus respirer. Il ne faut pas attendre ça pour manger », a compris cette paysanne de toujours qui constate « des soucis climatiques récurrents depuis dix ans. Il fait chaud en février et mars, ça bourgeonne, puis on a un retour du froid. »