L’art africain lève les masques au quai Branly
L’événement «Les Forêts natales» se tient à Paris
Le musée du quai BranlyJacques Chirac (Paris, 7e) fait l’événement avec son exposition « Les Forêts natales, arts d’Afrique équatoriale atlantique » (jusqu’au 21 janvier). Yves Le Fur, commissaire de l’exposition et directeur des collections du musée, a rassemblé des chefs-d’oeuvre de la sculpture africaine datant du XVIe jusqu’au début du XXe siècle. « Ce sont les oeuvres qui ont la plus forte portée esthétique à mes yeux », explique-t-il. A travers une présentation par zones géographiques (et tribus d’origine) et types d’objet, le musée adopte une typologie d’exposition très classique et formelle. Pour Yves Le Fur, l’art des tribus Fang, Kwele ou Punu peut être traité comme n’importe quelle forme d’art : « Regardez ces masques Galwa! Il y a des allers-retours entre figuratif et abstraction, une complexité des styles. La forte géométrisation des masques révèle une abstraction à la fois simple et extraordinaire, une construction savante. » « Les artistes du monde entier ont été fascinés par ces oeuvres quand ils les ont découvertes », raconte, en connaissance de cause Yves Le Fur, commissaire, il y a quelques mois, de l’exposition « Picasso primitif ». Mais les ponts entre art africain de cette zone et monde occidental dépassent largement le cadre du surréalisme. Ainsi l’exposition a-t-elle la particularité de présenter les oeuvres les plus prisées du marché. En déambulant dans l’exposition, Yves Le Fur attire l’attention sur certains points communs entre différentes oeuvres. « Dans les statuettes qui ornaient des reliquaires, on voit souvent des statuettes avec des corps infantiles,qui marquent le cycle de continuité de la vie, et des têtes un peu… alien, pas humaines, qui signalent un ailleurs. Même la position des mains donne une injonction contradictoire qui accueille et repousse en même temps. » L’ensemble des oeuvres, très riche, garde malgré tout une cohérence. « C’est une région assez vaste où l’on trouve les mêmes types de rituel, que ce soit avec des masques ou avec ces statuettes de reliquaires, raconte Yves Le Fur. Dans ces oeuvres, il y a toujours une polysémie d’interprétation qui nourrit le rite initiatique. On accède à différents niveaux de connaissance et d’analyse en côtoyant les anciens qui savent lire l’abstraction de ces oeuvres. » Le visiteur passe par différentes émotions au fur et à mesure de sa déambulation éducative. « Il y a un raffinement, une expressivité… c’est à chacun de le ressentir », explique Yves Le Fur en s’attardant sur le « travail de coiffures très sophistiquées » ou les patines éclatantes réalisées avec de la résine, de l’huile et du vin de palme. Pour le commissaire, qui a vécu en Afrique, cette exposition a une dimension particulière. Mais le conservateur sait que ces oeuvres sauront toucher un large public par leur beauté universelle.
Le visiteur passe par différentes émotions pendant sa déambulation éducative.