Contre vents et marées, Bestaven a su s’imposer
Le skippeur a surmonté quelques galères avant de s’adjuger la victoire
Début janvier, nous nous demandions ici même si Yannick Bestaven n’avait pas déjà remporté le Vendée Globe, alors qu’il venait de franchir le cap Horn avec 100 milles d’avance sur Charlie Dalin et 400 milles sur Thomas Ruyant. La prophétie s’est certes réalisée, mais le papier a franchement mal vieilli. La victoire confortable promise à Maître Coq s’est transformée en course contre-lamontre à cause d’un savant mélange de caprice météorologique et «d’une petite erreur de stratégie», dixit Michel Desjoyeaux, qui lui auront fait perdre l’équivalent d’un jour et demi de navigation au large des côtes brésiliennes. «Ce n’était pas bon d’être premier, en fait, a souri le vainqueur à son arrivée aux Sables-d’Olonne. Quand j’étais en tête, je me suis fait reprendre, et là, Charlie [Dalin], je lui ai repris les heures suffisantes pour passer devant, avec le temps de compensation.»
Le ton était un peu moins enjoué vingt jours avant l’arrivée sur les côtes vendéennes. On se souvient notamment de cette vacation, où Bestaven a eu du mal à cacher sa frustration après deux jours passés dans une molle (pas de vent) que ses poursuivants, à qui il avait servi d’éclaireur, ont pris un malin plaisir à contourner. «C’est dur, parce que tout le monde est revenu, disait-il alors. C’était prévu. Mais après plus de soixante jours de course, il faut avoir le moral.» La claque le fait plier sans rompre et, comme souvent chez les champions de sa trempe, l’oblige à puiser dans des ressources insoupçonnées. En VO dans le texte, à l’arrivée : «Le Vendée Globe, c’est dur, on croit avoir pensé à tout, tout imaginer et, finalement, on doit aller chercher des ressources bien profondes en soi. » Et, quand bien même le fardeau est devenu trop lourd à porter pour l’aventurier, celui-ci a toujours pu prendre appui sur son équipe à terre, à laquelle il était relié via un groupe WhatsApp composé de son attachée de presse, sa compagne, le boat captain, le directeur, Anne Combier (team manageur) et son coach mental, Eric Blondeau. Ce dernier compare la détresse brésilienne de Bestaven à celle d’un peintre à qui l’on a laissé pinceaux et peinture, mais enlevé la toile. « C’est la difficulté à agir sur les éléments qui était la problématique, à ce moment-là. Quand on ne peut pas agir sur les éléments, on agit sur sa posture. Se reposer était un de ces éléments. Mais aussi d’en profiter pour faire des réparations, s’occuper de lui, du bateau et simplement attendre, être prêt à rebondir. Il a accepté sa réalité. Il a vu les autres passer devant, mais on a surtout travaillé sur sa capacité à réagir une fois que le vent était plus favorable. On a travaillé sur sa capacité à exploser, une fois que la nature a bien voulu lui accorder un peu de bénéfice.»
« Le Vendée Globe, c’est dur. Il faut aller chercher des ressources bien profondes en soi. »
Yannick Bestaven