Les prescriptions de Matignon
CDI de chantier, négociations sans syndicats, nouvelles règles de recours aux prud’hommes... Le gouvernement a détaillé, jeudi, ses ordonnances qui doivent changer la vie de six millions de salariés.
Le gouvernement a dévoilé son jeu. Jeudi, le Premier ministre et la ministre du Travail ont rendu publiques les ordonnances qui vont changer le Code du travail et la vie des entreprises. Plutôt saluées par le patronat, elles sont accueillies plus fraîchement par certains syndicats, la CGT en tête. Une manifestation est déjà programmée le 12 septembre (lire ci-contre). A quoi faut-il s’attendre?
La négociation sans syndicats.
Dans les TPE (moins de 11 salariés) et les PME (moins de 50 salariés), il n’y a pas forcément de délégués syndicaux. Sans leur présence, il était impossible, jusqu’à présent, de signer des accords d’entreprise. Désormais, si les syndicats sont absents, le chef d’entreprise pourra directement dialoguer avec un représentant du personnel sur tous les sujets ouverts à la négociation : temps de travail, primes, treizième mois, etc. Et dans les entreprises de moins de 20 salariés, si personne ne veut jouer le rôle du délégué, il pourra même faire valider un accord par référendum (avec une majorité des deux tiers). L’organisation Attac redoute que cela « permette aux employeurs de négocier les régressions au niveau qui leur convient le mieux ».
Les modalités du CDD et le recours au CDI de chantier.
Autre rupture par rapport au droit existant : les branches pourront décider, après accord entre patronat et syndicat, de modifier la durée des contrats ou la période de carence entre plusieurs CDD. Même principe pour le « CDI de chantier », un contrat beaucoup utilisé dans le BTP, qui permet de licencier un salarié une fois la mission prévue achevée. D’autres secteurs pourront s’en emparer.
Les règles de recours aux prud’hommes.
Un salarié s’estimant victime d’un licenciement abusif devra saisir les prud’hommes dans les douze mois suivant son départ de l’entreprise, contre vingt-quatre mois auparavant. « Cela ne veut pas dire que le contentieux sera tranché plus rapidement, nuance Danièle Chanal, avocate spécialiste en droit du travail. Le changement de législation pourrait provoquer un encombrement des prud’hommes, parce que les gens les saisiront plus vite. » Autre changement : il y aura bien un barème obligatoire pour les dommages et intérêts versés en cas de licenciement « sans cause réelle ni sérieuse ». Une ligne rouge pour la CGT, selon qui « cela permettra de connaître le prix à payer pour se séparer d’un salarié, quels qu’en soient les motifs ».