20 Minutes (Nice)

La jeunesse dans le brouillard

Chômage, problèmes de logement, décalage avec les politiques... Depuis Alger, où Emmanuel Macron est en déplacemen­t, des jeunes témoignent de leur frustratio­n, mais aussi de leurs envies de changement.

- De notre envoyée spéciale à Alger, Laure Cometti

Penchée sur ses notes, Ouarda Machouk griffonne. D’ici à quelques minutes, cette étudiante de 25 ans enregistre­ra une émission musicale consacrée aux jeunes talents algériens. Dans ce studio bricolé dans un appartemen­t d’Alger, une webradio consacrée à la jeunesse a vu le jour il y a plus d’un an, sous la houlette de l’organisati­on apolitique Rassemblem­ent actions jeunesse (RAJ). C’est aussi dans la capitale algérienne, où est attendu ce mercredi Emmanuel Macron (lire cicontre), que Djamila Ould Khettab, 28 ans, a créé Inty, un magazine féminin en ligne collaborat­if, et que Riadh Touat, 31 ans, employé dans la pharmaceut­ique le jour, se transforme la nuit en dénicheur de talents pour « Wesh Derna? », sa websérie documentai­re. Dans ce pays où 70 % des habitants ont moins de 30 ans, les jeunes ne se sentent pas toujours bien représenté­s. Certains ont donc créé leur média.

Difficile de se projeter

« La jeunesse a envie de changement, mais l’Etat, la politique, la religion, n’aident pas toujours. Beaucoup de jeunes n’arrivent pas à se projeter », souffle Houfel Lila, 30 ans, qui travaille dans l’hôtellerie. « Le chômage est un passage imposé pour beaucoup », souligne Djelal Mokran, bénévole du RAJ. La difficulté de louer un logement quand on est célibatair­e, et de surcroît si l’on est une femme, ou les emplois sousqualif­iés que nombre de diplômés doivent accepter, faute de mieux, font partie des sujets traités par Inty. Ils reflètent l’évolution de la jeunesse, qui se sent en décalage avec les règles d’une société régie par le Code de la famille, et avec une économie peu diversifié­e, très dépendante des hydrocarbu­res, alors que le prix du baril de pétrole a chuté. « Cette chute est une opportunit­é de diversifie­r notre économie, et pour cela il faut faire plus confiance aux jeunes », estime Riadh Touat, qui préfère voir le verre à moitié plein plutôt qu’à moitié vide. Et si « les jeunes Algériens manquent de modèles inspirants », il se réjouit de vivre à une époque où il est « facile de communique­r, de montrer des initiative­s positives ». « On en a parfois marre que l’Algérie soit réduite à son président, comme si le pays aussi était paralysé, alors qu’il est super jeune et dynamique », lâche un peu plus loin une jeune femme. Dans moins de deux ans, Abdelaziz Bouteflika pourrait briguer un cinquième mandat.

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 ??  ?? Dans le studio de la webradio RAL, Ouarda Machouk, l’étudiante animatrice, reçoit le musicien Abdou L’Gnawi.
Dans le studio de la webradio RAL, Ouarda Machouk, l’étudiante animatrice, reçoit le musicien Abdou L’Gnawi.

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