L’exécutif courtise les retraités en vue des municipales
Après avoir pris des mesures pénalisant le pouvoir d’achat de certains seniors, Macron et Philippe rectifient le tir
Jeudi, le Premier ministre Edouard Philippe a annoncé que 300 000 retraités modestes seraient exemptés de la hausse de la CSG, et non 100 000, comme initialement prévu. Mardi, c’est Emmanuel Macron qui a enterré toute modification de la fiscalité des successions lors d’une réunion : « On n’y touchera pas tant que je serai là (…). Arrêtez d’emmerder les retraités. » Des propos que l’entourage du chef de l’Etat a pris soin de rapporter à la presse. Pour envoyer un signal de plus aux seniors ?
En mars, ils étaient des dizaines de milliers à manifester, pour protester notamment contre la baisse de leur pouvoir d’achat à cause de la hausse de la CSG. Fin août, Bercy annonçait que les pensions ne seraient plus indexées sur l’inflation, et qu’elles augmenteraient de 0,3 % en 2019, en dessous de l’inflation à 1,5 %. « La relation entre les seniors et le gouvernement est dans une phase critique », estime Luc Rouban, politologue et auteur du Paradoxe du macronisme (Presses de Sciences Po). Mais les gestes fiscaux cités plus haut sont des «concessions faites à la philosophie macroniste de valoriser le travail, la mobilité sociale. Cela aurait été très risqué de toucher aux droits de succession, car le patrimoine et la transmission sont des sujets cruciaux pour les Français, surtout les plus âgés », poursuit le chercheur.
Municipales en vue
L’exécutif veille donc à soigner les plus de 60 ans, qui composent « un tiers de l’électorat, souligne Luc Rouban. Les seniors ont tendance à voter pour la droite, il y a donc une menace directe pour LREM aux municipales de 2020. » D’autant plus que, d’ici au scrutin, le gouvernement compte faire adopter sa réforme des retraites à l’été 2019 et ouvrir le débat sur la GPA, la PMA, la fin de vie dans le cadre du projet de loi bioéthique. Autant de sujets très sensibles pour les seniors, selon Luc Rouban. « Si le macronisme se déploie sur le terrain du libéralisme culturel et sociétal, il risque de s’éloigner des personnes âgées, plus attachées à la religion et à la tradition. » Une chance que la droite compte saisir. Dans les médias et sur les réseaux sociaux, LR critique régulièrement la politique du gouvernement pour les plus âgés. Chez les marcheurs, on se défend de mener une politique « anti-retraités ». « Ils le savaient dès le départ, c’était dans le programme », rappelle Olivier Damaisin, député LREM du Lot-et-Garonne qui fait partie de la trentaine d’« ambassadeurs » chargés d’« expliquer la réforme aux députés et sur le terrain ». La bataille pour les voix des retraités semble pourtant bel et bien avoir commencé.