20 Minutes (Nice)

Coupés du monde, ils s’organisent

Montagne A Sospel, la seule route menant à deux hameaux s’est effondrée il y a six mois

- Fabien Binacchi

Du bois, des bonbonnes de gaz, une pompe à chaleur et du foin pour les bêtes... Les « déroutés de Sospel » s’apprêtent à passer l’hiver, toujours coupés du monde. Mercredi matin, un peu plus de six mois après l’effondreme­nt de la seule route d’accès à leurs hameaux de Sainte-Sabine et Béroulf, sur les hauteurs de Menton, ces 45 habitants organisaie­nt un héliportag­e. Le but ? Transporte­r tout ce qui ne peut pas l’être à dos d’homme, dans l’escarpé sentier qu’ils piétinent tous les jours. Sans autre choix.

« On monte les courses du quotidien dans un sac à dos, mais les charges très lourdes, c’est beaucoup trop compliqué », explique Jacques Denaix, le président de l’associatio­n qui s’est formée sur cette montagne dont un pan entier s’est décroché, emportant avec lui plus de 200 m de voirie.

Optimisme ou fatigue

« On a dû aussi descendre deux véhicules, dont un fourgon qu’il a fallu entièremen­t désosser pour qu’il puisse être soulevé, précise le responsabl­e. L’hélico, c’est un peu la seule solution en attendant l’aménagemen­t d’une piste qu’on nous promet pour le milieu du printemps [lire l’encadré]. » Mais Jacques Denaix fait preuve « d’optimisme » : « Il y a de la solidarité. On se dit que c’est une épreuve intéressan­te dans notre vie. Nous avons appris à nous adapter, à pied. On rajoute une demi-heure le matin et une demi-heure le soir. Et on doit prendre une tenue de randonnée et la lampe frontale. » Leur kit de survie dans le sentier du Gerbaïs, ce chemin

qui serpente en sous-bois et fait le lien entre le village et les habitation­s. Mais pas simple pour tout le monde d’avaler le dénivelé. Et le sol glissant, plus encore avec les feuilles tombées et les températur­es qui vont baisser. « On le vit mal, très mal. On est plusieurs à être blessés et c’est compliqué. Moi, j’ai mal au genou, alors je ne descends même plus tous les jours », témoigne Michel Daigneau, 68 ans et « fatigué de cette situation » .

« Le matin ou en début de soirée, il fait nuit noire. Et se retrouver seule sur ce passage, ce n’est pas rassurant, décrit Florence Sebille. Mieux vaut ne pas oublier le téléphone et veiller à ce qu’il soit bien chargé. » Mais cette habitante de Sainte-Sabine sait qu’il faudrait faire avec. Encore de longs mois.

« On se dit que c’est une épreuve de vie intéressan­te. » Jacques Denaix, président des Déroutés de Sospel

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L’héliportag­e a eu lieu mercredi entre le lieu de l’effondreme­nt et le sentier.
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