Marine Périn décode la « cyberviolence conjugale »
« Traquées », de Marine Périn, premier documentaire financé par YouTube, donne la parole à quatre victimes
C’est avec le financement accordé par le prix EllesFontYouTube (soit 15 000 €), qui vise à accroître le nombre de youtubeuses, que Marine Périn a pu réaliser un documentaire sur un sujet méconnu : les cyberviolences conjugales. Diffusé depuis lundi sur la plateforme de vidéos, « Traquées » explore ainsi le quotidien de quatre victimes.
Raconte-nous ton documentaire…*
C’est un documentaire sur les cyberviolences conjugales, qui sont un outil supplémentaire pour maintenir l’emprise. Ce que j’entends par «cyber», c’est tout ce qui relève des nouvelles technologies. J’ai repéré quatre grandes formes de violence : le harcèlement par SMS, la cybersurveillance, le « revenge porn » et les violences administratives (par exemple, empêcher sa compagne d’avoir accès à son compte de la CAF).
Comment se manifeste la cybersurveillance ?
C’est demander à sa compagne de rendre des comptes : « Envoie-moi une photo qui prouve que tu es là. » Installer des logiciels espions. Demander les mots de passe ou la suppression de messages. Cela aggrave l’isolement.
Les nouvelles technologies en sont-elles responsables ?
Non, pas du tout, parce que beaucoup de victimes disent qu’elles ont trouvé de l’aide et de l’info sur les réseaux sociaux. Il existe par exemple un chat en ligne de l’association En avant toutes. Une victime m’a dit qu’elle s’en était sortie car elle a reconnu des mécanismes de violence conjugale grâce à des infos qu’elle a trouvées en ligne.
Tu es la première documentariste française financée par YouTube, ça fait quel effet ?
Je ne l’avais pas vu comme ça, avant que tu m’en parles. J’ai toujours été sur YouTube [sa chaîne s’appelle Marinette – Femmes et féminisme], car on y touche un public plus jeune. Et là, j’ai envie que mon documentaire touche les jeunes, parce que les jeunes femmes sont un peu plus concernées par les violences conjugales que les femmes de tous âges (une femme sur sept, contre une femme sur dix).
C’est ça, l’avenir du documentaire : être sur YouTube ?
Les productions audiovisuelles sur le Web ont beaucoup moins de moyens : on a fait ça avec dix fois moins qu’un budget télévisuel, et je me suis fait prêter tout le matos. Mais France Télévisions fait travailler des youtubeurs, Arte met en ligne ses documentaires sur YouTube… Cela devrait se faire petit à petit.
* Nous avons choisi le tutoiement pour retranscrire la spontanéité du moment.