20 Minutes (Nice)

La minimisati­on du Covid-19 par le pouvoir inquiète

Trois personnes vivant la crise sanitaire depuis le Brésil racontent l’inquiétude des habitants face à la gestion de la pandémie

- Oihana Gabriel

On savait le Brésil polarisé, avec une population divisée par les inégalités et, depuis janvier 2019, par un président. Jair Bolsonaro, adoré par 30% de la population, honni par une autre partie. L’épidémie de coronaviru­s semble souligner encore un peu plus les opposition­s. Le pays, qui compte 210 millions d’habitants, a enregistré 38 700 morts, un nombre que certains spécialist­es considèren­t comme sous-évalué, faute de tests en nombre suffisant. La désinforma­tion étatique, les manifestat­ions pro et anti-Bolsonaro laissent penser que le pays serait à un tournant. « Contrairem­ent à ce qu’on peut imaginer, la riposte sanitaire a été bien menée, explique Christian Pouillaude, blogueur français résidant à Rio. Début mars, le ministère de la Santé a organisé un plan de lutte contre la pandémie. Le 17 mars, le confinemen­t a commencé à Sao Paulo et Rio. Le masque était obligatoir­e à Rio avant la France ! Parallèlem­ent, Bolsonaro sortait ses inepties. Mais, dans les faits, il laissait faire son ministre. » Depuis, deux ministres ont été remerciés, notamment pour leur opposition à la chloroquin­e. Et deux militaires sont aujourd’hui à la tête du ministère pour gérer la pandémie.

«Les bolsonaris­tes ont fait du Covid une “petite grippe”. » Julia Otero, native de l’Etat de Rio

Certains maires et gouverneur­s d’Etats se sont opposés à Bolsonaro et ont imposé certaines restrictio­ns. Mais jamais de sanction. Ce double, voire triple discours, a accentué la confusion. Julia

Otero, 35 ans, devait rentrer à Paris, où elle habite, après un séjour à Niteroi, sa ville natale dans l’Etat de Rio. Mais son vol retour du 20 mars a été annulé. Elle est donc restée brésilienn­e pendant cette période compliquée. « Même si les médias grand public ont fait connaître l’importance du confinemen­t et du port d’un masque, de nombreuses personnes, en particulie­r les partisans du président, ont ignoré les règles, souligne-t-elle. Les fake news jouent également un grand rôle dans la désinforma­tion : les bolsonaris­tes ont fait du Covid une “petite grippe” et ont fait croire qu’elle avait été propagée par les médias traditionn­els.»

A Sao Paulo, l’Etat le plus peuplé et principal foyer de contaminat­ion, les commerces ont rouvert début juin. Les églises aussi. Des décisions inquiétant­es alors que le géant sud-américain est le deuxième pays au monde en nombre de contaminat­ions, et le troisième le plus endeuillé. « La majorité de la population est effrayée : les hôpitaux sont remplis, les cimetières au bord de la saturation», raconte Augusta Lunardi, journalist­e brésilienn­e à Sao Paulo. Alors que Bolsonaro nie toujours la mortalité élevée de la pandémie, une étude de l’université de Washington prévoit 125 000 décès d’ici le mois d’août.

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Le pays d’Amérique du Sud compte plus de 38000 morts liées au Covid-19.

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