Alex a-t-elle sauvé la « Nice-Cunéo » ?
Après la tempête, la ligne du « train des merveilles » apparaît comme le moyen le plus efficace pour circuler dans la vallée de la Roya
Dans le fracas du décollage d’un hélicoptère venu apporter, ce 6 octobre, quatre jours seulement après la tempête Alex, l’aide d’urgence dont dépend la survie de ses administrés, le maire de Tende est soulagé, mais pas dupe : le salut de sa commune ne viendra pas toujours des airs, mais « par le train ». Par la ligne ferroviaire NiceCunéo, inaugurée en 1928.
Un mois et demi plus tard, la noria d’hélicoptères s’est envolée. Passé le temps de l’urgence, celui de la reconstruction débute. Une piste vient d’ouvrir, mais l’espoir réside plus que jamais dans le chemin de fer. Il y a d’abord eu la draisine, ce petit train de service qui, le premier, a permis de rejoindre la gare de Fontan-Saorge avec vivres et matériel lourd. Puis le TER moderne y est parvenu à vitesse très réduite. Il a fallu attendre le 19 octobre pour qu’il puisse rallier Saint-Dalmas-de-Tende, où un quai provisoire a été assemblé à 1,5 km de la gare. Le 24, Tende a été désenclavée par le nord, avec l’arrivée du premier train italien venu de Limone.
Réouverture le 18 janvier
Pour ce « train des merveilles », un retour à une circulation identique à l’avant Alex avait été annoncé pour la mi-février. « La région a demandé à SNCF Réseau de faire mieux, confie le sénateur Philippe Tabarot, aussi conseiller régional. Des moyens considérables ont été déployés. Nous espérons une réouverture dès le 18 janvier.» Un calendrier soumis à la météo, mais aussi à une mauvaise surprise : après la gare de Fontan, un « mur à arcatures », supportant la voie sur près de cent mètres, glisse inexorablement. La SNCF a lancé une opération de sauvetage du viaduc centenaire, mais « ce tassement va nécessiter de suspendre la circulation des trains à compter de samedi et jusqu’à la fin de l’année », annonce Karim Touati, directeur SNCF Réseau en Paca.
Le chantier consiste à « clouer » l’ouvrage avec des tiges de 12 à 15 m. Dans le même temps, des travaux sont menés sur deux autres ouvrages fragilisés. Coût estimé de ces interventions d’urgence : 30 millions d’euros. Mais, pour pérenniser la ligne à long terme, il faudra dépenser des dizaines de millions d’euros supplémentaires.
« La région récupère 100 % du financement entre Nice et Breil-sur-Roya, ce qui représente environ 50 millions d’euros pour entretenir la ligne, calcule Philippe Tabarot. Pour la partie haute, de Breil à Tende, une convention francoitalienne est en renégociation. »
C’est l’une des particularités de cette ligne transfrontalière : une convention internationale, héritée des sanctions de la Seconde Guerre mondiale, régit son financement. Or, depuis dix ans, un bras de fer entre la France et l’Italie a conduit à une baisse des investissements, synonyme de délabrement de cette ligne riche de cent ouvrages d’arts.
Mais après des années d’incertitude, les ravages de la tempête viennent peut-être de sauver « la Nice-Cunéo » en prouvant combien cet axe représente une « ligne de vie » pour les habitants de la Roya.