20 Minutes (Nice)

Démographi­e Le grand de notre humanité 8

Le cap des huit milliards de Terriens va être franchi. Et pour 2 100 ? La progressio­n actuelle n’est pas garantie, et une chute est même possible

- Fabrice Pouliquen

Mardi, nous serons huit milliards d’humains sur Terre. C’est, en tout cas, le jour coché par l’organisati­on des Nations unies (ONU) dans ses projection­s de population mondiale. Si ce repère est symbolique, « il ne faudrait pas en conclure que nous connaisson­s mal l’état de la population mondiale, rassure Gilles Pison, démographe, professeur émérite au Muséum national d’histoire naturelle (MNHN) et auteur de L’Atlas de la population mondiale (éd. Autrement). Au contraire. Aucun pays n’a échappé au recensemen­t. » La tendance globale, elle, est à la hausse. On comptait 2,5 milliards d’humains en 1950, 4 en 1974, 6 en 1999, 7 en 2011 et 8 aujourd’hui… Soit un triplement en soixante-dix ans.

Des taux de fécondité en baisse

Pourtant, dans le même temps, le taux de fécondité – le nombre moyen d’enfants par femme – ne cesse de baisser. Il s’établit à 2,3. « Longtemps, l’hypothèse a été que ce taux convergera­it dans le monde autour de 2,1, le seuil de remplaceme­nt des génération­s, rappelle Gilles Pison. Cependant, dans les pays industrial­isés, la fécondité est en dessous de 2,1. Dans l’Union européenne, la moyenne s’établit autour de 1,59.» De plus, des pays du Sud suivent la même tendance que ceux du Nord. « C’est le cas de plusieurs États d’Asie, et de quasiment toute l’Amérique latine », précise le démographe.

Dès lors, pourquoi la population mondiale continue-t-elle d’augmenter ? Il reste, en premier lieu, des régions où la fécondité est encore élevée. « À 2,5, voire plus, indique Gilles Pison. C’est le cas de presque toute l’Afrique, d’une partie du Moyen-Orient et de l’Asie. » Mais ce n’est pas la seule explicatio­n. « Beaucoup de pays, densément peuplés, comptent une forte proportion de jeunes, en âge de procréer ou qui vont l’être, souligne-t-il. C’est le cas de l’Inde, qui devrait devenir, en 2023, le pays le plus peuplé au monde.» Selon les Nations unies, nous devrions être 8,5 milliards d’humains en 2030 et 9,7 en 2050. Et d’ici à 2100? À cet horizon, les trajectoir­es sont plus incertaine­s. Le scénario de l’ONU, qui suppose une baisse de la fécondité dans les pays où les familles nombreuses prévalent encore, prévoit que nous atteindron­s un pic de 10,4 milliards d’humains en 2086, avant un maintien jusqu’à 2100. Ainsi, une soixantain­e de pays verront leur population baisser d’au moins 1 % . Quant au taux de fécondité mondial, il passerait à 1,8 en 2100.

Les chercheurs américains de l’Institute for Health Metrics and Evaluation (IHME) dressent, eux, une tout autre projection dans une étude publiée dans The Lancet, en 2020. Comme l’ONU, ils tablent sur un pic de population dans la seconde moitié du siècle, dès 2064. Ensuite, la courbe évoluerait en pente douce, pour atteindre 8,7 milliards d’humains à la fin du siècle. Dans leurs calculs, les experts de l’IHME ont anticipé, dans les pays à forte croissance démographi­que, l’effet de décisions politiques visant à améliorer l’éducation des filles et à donner un meilleur accès à la contracept­ion. Ainsi, leur étude prévoit une chute spectacula­ire des taux de fécondité en Afrique subsaharie­nne. Au Niger, par exemple, on passerait de 7 naissances par femmes en 2017, à 1,8 à la fin du siècle. Qui vivra verra si ces scénarios se confirment.

« L’Inde devrait devenir, en 2023, le pays le plus peuplé. » Gilles Pison, démographe

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IStock / Getty images plus Des pays, comme l’Inde, à forte proportion de jeunes en âge de procréer, pourraient porter le nombre de Terriens à dix milliards.

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