Le prévenu a 28 ans, la victime 11, mais ce n’est pas un viol ?
Le parquet a estimé que la pré-ado a suivi sans contrainte l’adulte
Sait-on dire non à 11 ans? Un homme de 28 ans devait être jugé mardi devant le tribunal correctionnel de Pontoise (Val-d’Oise) pour avoir eu une relation sexuelle avec une pré-adolescente de 11 ans. Malgré une plainte pour viol, le parquet a renvoyé le prévenu pour atteinte sexuelle sur mineure de moins de 15 ans, estimant que la collégienne avait agi sans contrainte. « Il ne l’a pas forcée à monter [chez lui], mais c’est une enfant, elle est naïve », s’indigne son avocate, Me Carine Diebolt. Le procès a été renvoyé à février, mais l’émoi causé par cette affaire révélée par Mediapart reste entier. La loi interdit aux adultes d’avoir des relations sexuelles, même consenties, avec un mineur de moins de 15 ans. C’est le délit d’atteinte sexuelle sur mineur. En revanche, la qualification d’agression sexuelle ou de viol ne peut être retenue que si la relation a été obtenue sous violence, contrainte, menace ou surprise. Et ce, sans critère d’âge. Est-ce parce que l’adolescente n’a pas clairement exprimé son refus que le parquet n’a pas retenu la qualification de viol? A-t-il estimé qu’il n’y avait pas assez d’éléments caractérisant le crime et préféré correctionnaliser l’affaire plutôt que de risquer un non-lieu ? Joint, il n’a pas souhaité s’exprimer. Un examen au cas par cas La loi française « ne fixe pas d’âge de discernement, il appartient aux juridictions d’apprécier si le mineur était en état de consentir », a rappelé le Conseil constitutionnel en 2015. En clair : chaque dossier est examiné au cas par cas. « C’est au juge d’estimer si le jeune âge de la victime peut être un élément de contrainte, notamment morale », précise Jacky Coulon, secrétaire national de l’Union syndicale des magistrats. A l’étranger, la question ne se pose pas. En deçà de 14 ans en Belgique, l’acte sexuel relève automatiquement du viol ou de l’agression sexuelle. En 2016, le Haut Conseil à l’égalité a préconisé d’instaurer un seuil à 13 ans en France. Un avis resté sans suite. La question est désormais entre les mains du tribunal de Pontoise.