Une drôle de dame dans un drôle de drame
Juliette Binoche brille dans « Un beau soleil intérieur »
Claire Denis se lance dans la comédie romantique. La réalisatrice qui faisait manger de la chair humaine à Béatrice Dalle dans Trouble Every Day livre un film grand public : Un beau soleil intérieur, récompensé du prix de la SACD à la Quinzaine des réalisateurs, à Cannes. Juliette Binoche en quinquagénaire esseulée, mère d’un petit garçon, y cherche l’amour, le vrai. Un scénario malin cosigné par la romancière Christine Angot lui permet de croiser une belle brochette de mâles. 20 minutes explique pourquoi cette fantaisie sentimentale pourrait devenir le premier succès au box-office de la cinéaste.
Dialogues ciselés et situations savoureuses. Dès la première scène, où l’héroïne s’ennuie au lit avec un partenaire peu attentif qui a du mal à terminer sa petite affaire, on sait qu’on ne va pas s’ennuyer. Les dialogues ciselés (« Il y aurait encore un avant, après ? ») ou les situations savoureuses (les rencontres avec le lourdaud de la poissonnerie) mettent le coeur en fête. Ce portrait d’une femme actuelle qui assume les tracas de sa vie amoureuse amuse par sa liberté de ton comme par la justesse d’une description bien croquée des rapports amoureux.
Une complicité féminine réjouissante. L’auteure d’Un amour impossible et la réalisatrice ont éveillé leur fantaisie réciproque. « On s’est approchées l’une de l’autre et on s’est accrochées à nos vies, explique Claire Denis. On s’est prises en cours de route et éprises au fil du texte. On a essayé de regarder en face et avec sincérité nos échecs amoureux, nos nuages les plus sombres. Et on en a ri. » Juliette Binoche, avec son charme persuasif, sert de porte-parole à toutes les femmes en quête de tendresse, mais aussi de plaisir.
Il n’y a pas de mâle qui lui aille. Pour faire craquer la belle, Claire Denis sort le grand jeu. Xavier Beauvois, Bruno Podalydès, Alex Descas, Nicolas Duvauchelle et Philippe Katerine deviennent des archétypes masculins tordants. Mari adultère peine-à-jouir, dragueur maladroit, acteur mal dans sa peau : la gent masculine en prend pour son grade, et c’est fort réjouissant. Une gageure quand on sait que les scénaristes se sont inspirées des Fragments d’un discours amoureux de Roland Barthes, un texte pas vraiment poilant au départ.
Depardieu solaire comme jamais. Il est irrésistible, le bon Gérard Depardieu en mage qui finit par faire avaler à l’héroïne qu’il a des pouvoirs. Son duo avec Juliette Binoche est un bien joli moment de cinéma. C’est lui qui a donné son titre au film avec cette réplique : « Repérez le grand chemin de votre vie, et vous retrouverez un beau soleil intérieur. » Le spectateur le prend au mot et sort de la salle tout réchauffé d’avoir bien ri.