20 Minutes (Paris)

Le DJ Jerome Pacman « cherchait l’évasion »

Le DJ Jerome Pacman évoque l’essor des raves dans les années 1990

- Propos recueillis par Anne Demoulin et Thomas Weill

Une légende de l’électro. Jerome Pacman est l’un des pionniers des raves et des « after hours » à Paris, louvoyant peinard entre house et techno. Le mythique DJ a gentiment accepté de partager sa vision de l’utopie techno avec 20 Minutes, sous réserve de lui dire « tu ».

Comment as-tu découvert la house ?

En vacances à Ibiza, à la fin des années 1980, avec tout le folklore, la candeur.

Tes premières raves ?

A la campagne, dans des hangars, des entrepôts. Il y en avait toutes les semaines, de plus en plus grosses.

Où as-tu commencé à mixer ?

A Mozinor [à Montreuil, Seine-Saint-Denis], un endroit entre club et rave qui réunissait toutes les tribus. Un lieu officiel, mais affranchi. Les photograph­es ne pouvaient pas entrer. C’est là où je suis devenu officielle­ment DJ, plus ou moins résident.

Ton premier set à Mozinor ?

Cette première est gravée à jamais. Je faisais l’after. J’adorais prendre les platines à cette heure-là pour décompress­er. J’ai encore toute l’ambiance en tête. C’était monstrueux ! On sentait quelque chose d’énorme en train de se créer.

Quel était l’état d’esprit ?

Le même que le « Summer of Love ». On n’était pas dans la société de consommati­on, on ne rêvait pas d’argent, mais d’un idéal beaucoup plus philosophi­que que ça. Il n’y avait pas de sélection. Un mélange des genres hallucinan­t ! Des gens de toutes les classes sociales et toutes les génération­s.

Les raves avaient-elles une dimension politique ?

On les a rendues comme ça, parce qu’on les a parquées. La drogue a été le bon prétexte. Pourtant, on n’a pas vu des millions de mecs partir sur des civières.

Et le côté subversif ?

On cherchait plutôt l’évasion. Les gens avaient envie de kiffer l’instant.

A la fin des années 1990, certains sont retournés en club…

Oui, quand les Daft Punk, que j’adore, sont arrivés. Les caméras sont venues avec la French Touch qui a mis un coup de frais. Les clubs, on en sort et on y revient. Ce sont des cycles.

A quel moment du cycle sommes-nous ?

A un moment de contractio­n. Les soirées du type Concrete sont entre club et rave. Les clubs et les trucs organisés dans les montagnes coexistent. Si on veut avoir les pieds dans la boue, on peut !

La rave fait-elle encore rêver ?

On rêve toujours, l’esprit de la rave est toujours là. Beaucoup de choses sont acquises maintenant, mais il y a toujours des espaces de liberté à conquérir. Ces valeurs doivent être défendues !

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Jerome Pacman a commencé à mixer à Mozinor, en Seine-Saint-Denis.

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