La fermeture des jardins publics a-t-elle du sens ?
Face au manque de recul sur la circulation du coronavirus, le gouvernement s’oppose à la réouverture des jardins à Paris
La question divise presque autant que celle de la réouverture des écoles. Faut-il maintenir la fermeture des parcs et jardins publics pour limiter la circulation du nouveau coronavirus dans les zones classées «rouge»? Depuis le déconfinement, et plus encore à l’approche du pont de l’Ascension, de nombreux élus franciliens – Anne Hidalgo en tête – militent en faveur de leur réouverture. Objectif : permettre aux habitants de ces zones densément peuplées de prendre l’air tout en évitant les attroupements sur les quelques pelouses accessibles ou les berges. Pour l’heure, ils se heurtent à une fin de non-recevoir du gouvernement, qui craint que la réouverture de ces lieux encourage les rassemblements.
Une image résume ce bras de fer, celle du canal Saint-Martin bondé le premier soir du déconfinement. L’illustration de la légèreté des Parisiens faisant fi des gestes barrières pour les uns, la preuve évidente, pour les autres, d’un manque d’espace. Les élus franciliens bénéficient du soutien du CSMF, premier syndicat de médecins libéraux. «Certains trottoirs sont bondés. Les Parisiens n’ont pas eu la possibilité de respirer pendant le confinement et ne le supportent plus», insiste le syndicat, qui alerte sur la «santé mentale» des habitants.
Un essai à La Courneuve
Si le gouvernement et les élus locaux peinent à trouver un terrain d’entente, c’est notamment en raison de l’absence de certitudes quant à la circulation du coronavirus en milieu ouvert. Plusieurs études concernent le sujet. A Hong Kong, par exemple, des chercheurs ont analysé les données issues du registre des contaminations provenant de 120 villes chinoises. L’immense majorité des 318 foyers épidémiques détectés, soit l’ensemble des cas ayant comme origine le même patient, enregistrait plusieurs sources de contamination. Mais, dans 80 % des cas, ils se sont en partie formés chez des particuliers, et pour 34%, dans les transports. A l’inverse, un seul foyer impliquant deux personnes s’est créé dans un environnement extérieur.
C’est encourageant, mais de nombreuses questions demeurent. Le faible nombre de foyers extérieurs pourrait-il s’expliquer par la difficulté à retracer les interactions entre des individus infectés? Ou simplement par le fait que le confinement, qu’il soit imposé ou fortement conseillé, a limité les interactions? Enfin, des questions pèsent sur la remontée des données de Chine, que de nombreux scientifiques estiment parcellaire.
Désormais, les élus franciliens ont les yeux rivés sur le parc interdépartemental de La Courneuve, le seul de la région à avoir bénéficié d’une autorisation d’ouverture, à titre expérimental. Dans cet espace de 410 ha, la distanciation sociale est plus facile à faire respecter que dans les parcs parisiens dont le plus grand, celui de la Villette, ne fait que 55 ha.