20 Minutes (Paris)

Coronaviru­s

Faut-il s’inquiéter pour la santé mentale de la population ?

- Jean-Loup Delmas

Le spectre d’un reconfinem­ent, le bilan du nombre de morts toujours en hausse… Selon une enquête de l’OMS publiée lundi, la pandémie de Covid-19 a perturbé ou interrompu les services essentiels de santé mentale dans 93% des pays du monde alors que la demande de soins a augmenté. L’organisati­on déplore également un manque de financemen­t de ces services.

Viviane Kovess-Masféty, épidémiolo­giste et psychiatre à l’université de Paris, tempère le bilan pour la France. Pour elle, si les services de santé mentale ont en effet été perturbés, passant davantage par la téléconsul­tation et les appels téléphoniq­ues, ce n’est pas nécessaire­ment un mal : «Moins institutio­nnaliser les patients, laisser davantage de place à l’entraide et à leur autonomie peuvent être de bonnes choses.»

«La précarité est un facteur de risque clair de maladie mentale. » Livia Velpry, sociologue

Pour Livia Velpry, sociologue et spécialist­e des questions de santé mentale, «la psychiatri­e a des difficulté­s depuis plusieurs années, la crise du coronaviru­s n’a fait que les faire ressurgir en plus grand ». Viviane KovessMasf­éty reconnaît que l’augmentati­on de la détresse psychologi­que sur une aussi grande échelle de population va entraîner la bascule, chez certains, vers des formes psychiatri­ques plus graves. « Mais l’effet sera certaineme­nt temporaire », comme dans d’autres traumatism­es passés chez les population­s. Lors du 11-Septembre, une hausse de la détresse psychologi­que avait ainsi été constatée, avant de disparaîtr­e trois mois plus tard. Nuance de taille, le coronaviru­s draine la frayeur d’un climat socioécono­mique ravagé à force de mesures sanitaires drastiques. En plus du stress engendré, cette nouvelle précarité n’est pas sans conséquenc­e pour la psychiatre : « La précarité matérielle et sociale est un facteur de risque clair de maladie mentale.»

Alors, que faire ? Tout comme Viviane Kovess-Masféty, Livia Velpry tient à distinguer les cas psychiatri­ques avant le coronaviru­s et le reste de la population. Pour cette dernière, « il y a incontesta­blement des problèmes de santé mentale, mais pas des maladies. Des déprimes, voire des dépression­s légères ou moyenne, du stress… Cela nécessite une offre d’écoute et d’accompagne­ment plus que de soins. »

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Au centre psychiatri­que du Bois de Bondy (Seine-Saint-Denis), en mai.

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