Brutal combat
La capitale dénombre une quinzaine de bandes rivales. Connues de la police, elles agissent avec violence et impulsivité, comme lors de l’agression de Yuriy.
La vidéo est d’une violence inouïe. Une dizaine d’individus s’acharnent sur Yuriy, 15 ans, à terre. C’était le 15 janvier, sur la dalle Beaugrenelle (15e). L’adolescent, qui souffre de multiples fractures, notamment au crâne, reste dans un état critique. L’enquête, elle, se précise. Et si aucune interpellation n’a encore eu lieu, les enquêteurs penchent pour un règlement de comptes entre bandes rivales, en l’occurrence entre celles de
Beaugrenelle et de Vanves, une commune voisine des Hauts-de-Seine. Une seconde vidéo – non datée –, publiée ce week-end, a alimenté cette hypothèse. On y aperçoit un jeune garçon, le visage ensanglanté, victime de coups et d’insultes. «Tu vas revenir sur la dalle ? », interroge l’un de ses agresseurs. Est-ce le premier acte de cette tragédie ? L’hypothèse est explorée par les enquêteurs du 3e district de police judiciaire.
Une quinzaine de bandes actives sont aujourd’hui répertoriées dans la capitale, un chiffre stable depuis des années. «Ce sont des groupes bien identifiés d’au moins trois personnes qui sont dans une logique d’appropriation du territoire », précise Laëtitia Vallar, la porte-parole de la préfecture de police de Paris. A ces bandes s’en ajoutent d’autres, beaucoup moins stables, qui se forment et se déforment au rythme des querelles. Selon nos informations, les deux bandes impliquées dans la rixe qui a conduit au lynchage de Yuriy seraient de celles-là. «On est face à un phénomène spontané où des jeunes du même quartier vont se rassembler autour d’un différend pendant quelques jours ou semaines», poursuit Yvan Assioma, secrétaire Ilede-France du syndicat Alliance. «Les réseaux sociaux font office de catalyseur de la violence et des différends pour des motifs futiles, une histoire de coeur ou un mauvais regard peut prendre des proportions très importantes », précise Laëtitia Vallar.
Si l’on s’en tient aux chiffres, cette délinquance perdrait de l’ampleur. En cinq ans, le nombre de phénomènes violents attribués à ces rivalités a baissé de 47,7 % à Paris, passant de 159 actes recensés en 2016 à 89 en 2019 et 83 en 2020. Mais cette baisse quantitative n’est pas synonyme d’une diminution de la violence. Si les armes à feu restent rares lors de ces affrontements, les armes blanches (bâtons, marteaux) et le mobilier urbain sont très utilisés. Age moyen des membres d’un groupe: 17 ans et 2 mois. Le phénomène reste difficile à prévenir, notamment à cause de son aspect spontané. «Dans certains lieux, la présence policière est renforcée et l’aménagement urbain est adapté : les grilles autour des arbres sont scellées, l’éclairage est renforcé», assure Laëtitia Vallar.
«Ces groupes sont dans une logique d’appropriation du territoire. » Laëtitia Vallar, porte-parole de la préfecture de police de Paris