«J’avais jamais fait de business avec un policier»
Huit agents, dont six de la BAC du 18e, sont jugés dans une affaire de corruption
A quel moment faut-il s’étonner des coïncidences ? En avril 2017, Ibrahim A. et Nazim B. ont été interpellés à deux jours d’intervalle à Paris (18e). Les deux hommes ont été contrôlés pour un délit routier qui a débouché sur la découverte d’un pochon de cocaïne. Tous deux affirment que la drogue a été placée dans leur véhicule par le brigadier Karim M. Autre point commun, ils étaient en « affaires » avec Ahmad M., une figure de la Goutte-d’Or et indic privilégié dudit policier.
Depuis mercredi et jusqu’au 12 février, huit personnes, dont six policiers de la BAC du 18e arrondissement, sont jugées dans cette affaire de corruption. Ahmad M. le reconnaît sans détour, il a piégé les deux hommes. Le premier, Ibrahim A., parce qu’il ne lui avait pas donné les faux papiers d’identité pour lesquels il avait payé 4 000 €. Les deux hommes se connaissent depuis longtemps. Le premier, à la tête d’une entreprise de bâtiment, employait régulièrement le second sur des chantiers. Parfois, il lui demande des « services » en échange. C’est ainsi qu’il le met en relation avec Nazim B. Lui cherche à échanger des espèces contre des chèques. Les deux premières transactions, pour un montant de 60 000 €, se passent sans accroc. Pour la troisième, en revanche, Ahmad M. lui fournit des faux chèques contre 245 000 € versés en espèces. Il sera interpellé alors qu’il cherchait à récupérer l’argent.
«Je suis la victime»
A l’en croire, les deux contrôles ont été orchestrés par le brigadier. Pour la seconde opération, il assure que Karim M. lui aurait réclamé sa part, 80 000 €. « Au début, j’ai hésité, j’avais jamais fait de business avec un policier », persiste Ahmad M. A ses côtés dans le box, le policier déchu fait «non» de la tête. «Je n’ai jamais reçu d’argent», s’exclame le fonctionnaire. Lui reconnaît seulement avoir interpellé les deux hommes grâce à une information de son « indic » : les deux hommes versaient, selon ce dernier, dans le trafic de cocaïne. Il estime aujourd’hui avoir été piégé. «Je suis la victime dans cette histoire. »