20 Minutes (Paris)

Le dauphin justifie les moyens

Des réflexions sont menées pour mettre fin à l’échouage de centaines de cétacés, pris accidentel­lement dans les filets de pêche

- Fabrice Pouliquen

Quatre cents carcasses de dauphins communs retrouvées sur la côte atlantique française depuis le 1er janvier. « Du jamais-vu », lance Hélène Peltier, biologiste de l’observatoi­re Pelagis, qui recense ces échouages. « Et on ne peut dénombrer que les dauphins qui s’échouent sur les côtes », complète Lamya Essemlali, présidente de l’ONG Sea Sheperd France. Le bilan serait plus lourd si on ajoutait les dauphins tombés au fond de l’océan. « Huit fois plus », estime Hélène Peltier.

Ces cétacés se sont majoritair­ement pris les nageoires dans des filets de pêche. Les navires qui sillonnent le golfe de Gascogne traquent des poissons qui se nourrissen­t des mêmes proies que les dauphins communs. Pour éviter un tel drame, un groupe de travail a été mis en place en 2016 et réunit l’Etat, Pelagis, des profession­nels de la pêche et des associatio­ns. « Mais tout semble se résumer aux pingers, présentés comme la solution miracle », fustige Lamya Essemlali. Ces répulsifs acoustique­s, installés sur le chalut, émettent un son désagréabl­e pour les cétacés et visent à les écarter des navires. Testés depuis 2018, « ils ont permis une diminution de l’ordre de 65% des captures accidentel­les pour les chaluts équipés », indique José Jouneau, président du comité régional des pêches des Pays-de-la-Loire.

Depuis le 1er janvier, ces pingers sont obligatoir­es sur les chalutiers. Mais

Lamya Essemlali rappelle que ces navires ne sont qu’une partie des engins de pêche dans le golfe de Gascogne. S’y ajoutent les fileyeurs, dont la technique consiste à déposer ses filets sur le fond marin. José Jouneau en dénombre entre 400 et 450 en activité. D’autres mesures ont été annoncées par l’Etat à l’automne 2020, comme le renforceme­nt des survols aériens des bateaux ou la déclaratio­n systématiq­ue des captures accidentel­les par les pêcheurs. Mercredi, le Parti de la nature demandait à aller plus loin, avec 13 propositio­ns, dont celle d’instaurer à terme la présence de caméras à bord des bateaux. Et surtout celle de fermer la pêche dans le golfe de Gascogne pendant quatre mois, chaque année, lors des périodes de reproducti­on et de forte densité des cétacés.

« Il y a un consensus scientifiq­ue, au niveau européen, glisse Hélène Peltier. Peut-être pas quatre mois, mais au moins entre mi-janvier à mi-mars. » « La dernière des solutions », pour José Jouneau, qui alerte sur le coût économique d’une telle mesure. Mais le temps presse. « Les dernières espèces à avoir disparu depuis les années 1980 –le marsouin de Californie et le dauphin des fleuves en Chine – se sont éteintes à cause de la pêche », rappelle Hélène Peltier.

Une propositio­n pour fermer la pêche dans le golfe de Gascogne pendant quatre mois.

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Le cadavre d’un dauphin retrouvé sur la plage de Plovan, dans le Finistère.

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