Le dauphin justifie les moyens
Des réflexions sont menées pour mettre fin à l’échouage de centaines de cétacés, pris accidentellement dans les filets de pêche
Quatre cents carcasses de dauphins communs retrouvées sur la côte atlantique française depuis le 1er janvier. « Du jamais-vu », lance Hélène Peltier, biologiste de l’observatoire Pelagis, qui recense ces échouages. « Et on ne peut dénombrer que les dauphins qui s’échouent sur les côtes », complète Lamya Essemlali, présidente de l’ONG Sea Sheperd France. Le bilan serait plus lourd si on ajoutait les dauphins tombés au fond de l’océan. « Huit fois plus », estime Hélène Peltier.
Ces cétacés se sont majoritairement pris les nageoires dans des filets de pêche. Les navires qui sillonnent le golfe de Gascogne traquent des poissons qui se nourrissent des mêmes proies que les dauphins communs. Pour éviter un tel drame, un groupe de travail a été mis en place en 2016 et réunit l’Etat, Pelagis, des professionnels de la pêche et des associations. « Mais tout semble se résumer aux pingers, présentés comme la solution miracle », fustige Lamya Essemlali. Ces répulsifs acoustiques, installés sur le chalut, émettent un son désagréable pour les cétacés et visent à les écarter des navires. Testés depuis 2018, « ils ont permis une diminution de l’ordre de 65% des captures accidentelles pour les chaluts équipés », indique José Jouneau, président du comité régional des pêches des Pays-de-la-Loire.
Depuis le 1er janvier, ces pingers sont obligatoires sur les chalutiers. Mais
Lamya Essemlali rappelle que ces navires ne sont qu’une partie des engins de pêche dans le golfe de Gascogne. S’y ajoutent les fileyeurs, dont la technique consiste à déposer ses filets sur le fond marin. José Jouneau en dénombre entre 400 et 450 en activité. D’autres mesures ont été annoncées par l’Etat à l’automne 2020, comme le renforcement des survols aériens des bateaux ou la déclaration systématique des captures accidentelles par les pêcheurs. Mercredi, le Parti de la nature demandait à aller plus loin, avec 13 propositions, dont celle d’instaurer à terme la présence de caméras à bord des bateaux. Et surtout celle de fermer la pêche dans le golfe de Gascogne pendant quatre mois, chaque année, lors des périodes de reproduction et de forte densité des cétacés.
« Il y a un consensus scientifique, au niveau européen, glisse Hélène Peltier. Peut-être pas quatre mois, mais au moins entre mi-janvier à mi-mars. » « La dernière des solutions », pour José Jouneau, qui alerte sur le coût économique d’une telle mesure. Mais le temps presse. « Les dernières espèces à avoir disparu depuis les années 1980 –le marsouin de Californie et le dauphin des fleuves en Chine – se sont éteintes à cause de la pêche », rappelle Hélène Peltier.
Une proposition pour fermer la pêche dans le golfe de Gascogne pendant quatre mois.