Un jugement tant attendu
Le tribunal judiciaire doit indiquer ce lundi s’il contraint le groupe Servier à payer des dommages et intérêts
Les juges ont pris près de neuf mois pour réfléchir et motiver leur décision. Le tribunal judiciaire de Paris va rendre son jugement, ce lundi, dans l’affaire du scandale sanitaire dit du Mediator. Pour sanctionner le « choix cynique » d’un laboratoire ayant privilégié « ses intérêts financiers », le parquet de Paris a requis dans cette affaire plus de 8 millions d’euros d’amende contre le groupe Servier et trois ans de prison ferme contre son ex-no 2, Jean-Philippe Seta, l’ancien bras droit de Jacques Servier, décédé en 2014.
Déni de bonne foi
Tout au long de son réquisitoire livré sur deux jours, la procureure Aude Le Guilcher avait dénoncé les «manipulations, dissimulations, manoeuvres du groupe» pour cacher les propriétés anorexigènes du Mediator (lire l’encadré) et maintenir « coûte que coûte » sur le marché ce médicament remboursé par l’assurance-maladie. «La vraie question, la seule qui se pose, c’est comment cela a-t-il été possible?», a interrogé Hervé Témime, l’un des avocats du laboratoire lors de l’audience. Avant d’expliquer que Jacques Servier, même après la révélation du scandale, était dans le déni de bonne foi. « Il était profondément convaincu des bienfaits du Mediator. Il y croyait.» Au-delà de la décision pénale, la décision civile est très attendue par les quelque 5000 victimes qui se sont constituées parties civiles dans le volet de la procédure consacré à la «tromperie aggravée». Au titre du préjudice moral, elles réclament chacune 100000 € de dommages et intérêts. «Les amendes requises par le parquet ne représentent qu’un ou deux jours de chiffre d’affaires pour le laboratoire Servier, analyse Charles Joseph-Oudin, l’un des avocats de victime. Mais si le tribunal nous accorde les dommages et intérêts réclamés, Servier devra verser quasiment 500 millions d’euros.» Et même près du double si le tribunal accorde les 450 millions d’euros réclamés par une centaine de caisses d’assurance-maladie qui ont pris en charge le remboursement du Mediator quand il était commercialisé.