MONEY JUNGLE, NOTRE FEUILLETON
David d’Équainville (éditeur et auteur) et Pascal Henry (journaliste d’investigation et réalisateur) ont raconté lors des deux premières saisons de Money Jungle, une série librement inspirée de faits réels, les mésaventures de l’oligarque Oleg Chestov, occupé à sauver sa fortune. Celui-ci, affaibli par un cancer, obligé de jouer un double jeu avec les Américains et les Russes pour échapper aux conséquences de la guerre en Ukraine, voit le Royaume comme le dernier refuge possible. À la condition qu’il réussisse à nouer les bonnes alliances et à se débarrasser de son encombrant passé.
Résumé de l’épisode 22 : Dans la tête du Prince, le doute s’invite. Son action, sa légitimité, tous ces sentiments l’assaillent. Son parcours, depuis qu’il a accédé au trône, lui semble, parfois, vain. Les forces adverses qui se sont liguées pour tenter de le déstabiliser auront-elles raison de sa volonté ?
Testament
Les couloirs vitrés de la clinique offrent le spectacle d’une nature à peine domestiquée, dans cet immense parc qui prend des couleurs d’automne, mordorées. Au nord de New York, c’est déjà l’été
indien. Poussé par une infirmière, Oleg Chestov, assis dans un fauteuil roulant, laisse son regard se perdre dans ce tableau si apaisant. Les bouleaux lui rappellent les forêts au pied de l’Oural. Le chirurgien entre dans la pièce, avec ce sourire bienveillant des personnels hospitaliers habitués à la détresse humaine. Chirurgie et chimiothérapie sont au menu. L’opération est programmée pour le lendemain. Il ne s’attarde pas, son patient russe doit recevoir des membres de sa famille. L’infirmière se retire discrètement et laisse l’oligarque dans un salon cossu qui jouxte les salles de soins.
Aux murs, couverts d’un enduit pastel, des oeuvres originales des plus célèbres peintres du XXe siècle. Chestov, en connaisseur, reconnaît un Klimt, de médiocre facture comparé au sien, et un Mondrian, tout en lignes parallèles et perpendiculaires noires sur des aplats de couleurs vives.
Emma, sa fille aînée, la mine grave, vient s’asseoir dans le canapé de cuir fauve, flanquée de son époux sud-américain au bronzage impeccable. Elle sait qu’elle est là pour recueillir les directives qui lui permettront de réaliser ce que son père a prévu de longue date et qu’il souhaite voir accompli désormais par sa descendance. « Tu iras à Lugano chez le notaire Mazzotti, dit Oleg à sa fille, il est prévenu. Il a tous les documents en ordre pour que tu prennes en main notre fortune. Et, si tu manoeuvres bien, le Royaume sera à tes pieds… ».