La France a-t-elle vraiment besoin de plus de policiers ?
L’augmentation des effectifs prônée par plusieurs candidats fait débat
Sur cette question, ils sont pratiquement tous d’accord. Les principaux candidats à l’élection présidentielle se sont alignés, lors du débat de mardi, sur la nécessité de recruter plus de policiers et de gendarmes. François Fillon et Benoît Hamon suggèrent d’en embaucher 5000 sur la durée du quinquennat. Emmanuel Macron en souhaite le double et Marine Le Pen, le triple.
« Ils veulent montrer qu’ils savent faire preuve de fermeté. Mais aucun des candidats ne peut expliquer à quoi serviront ces nouveaux effectifs », estime Sébastian Roché, directeur de recherche au CNRS. « Regarder la question de la sécurité à travers le seul prisme des effectifs n’est pas pertinent, insiste Sebastian Roché. Le plus important, ce n’est pas le nombre d’agents mais leur niveau de qualification, de compétence et les moyens dont ils disposent », note-t-il. « La corrélation entre densité policière et délinquance n’est pas établie. Recruter plus de policiers et de gendarmes ne va pas forcément améliorer les choses », souligne Mathieu Zagrodzki, chercheur associé au Centre de recherche sociologique sur le droit et les institutions pénales. En recruter davantage pourrait en revanche « améliorer le quotidien des policiers ». Selon Mathieu Zagrodzki, il serait préférable d’engager des civils plutôt que des policiers pour s’occuper des tâches administratives, comme répondre au téléphone ou accueillir le public, surtout dans un contexte budgétaire restreint : « Former un policier prend plusieurs mois, alors qu’un agent administratif peut être formé en quelques semaines. Cela permettrait de redéployer des effectifs sur le terrain. » Jean-Claude Delage, secrétaire général du syndicat Alliance, estime également qu’« au-delà de la question des effectifs, il est nécessaire de recentrer les policiers sur leurs missions prioritaires » et donc « supprimer les tâches indues » comme les gardes statiques. « Il faut aussi mieux organiser la coproduction de sécurité entre la police nationale, municipale, les entreprises de sécurité privée. » Comme quoi, d’autres solutions existent.
« Le plus important, c’est leur niveau de qualification. »
Sebastian Roché, CNRS