Un désherbant bien enraciné
Alors que le gouvernement veut interdire à terme l’usage de l’herbicide, les agriculteurs se demandent comment le remplacer.
Un sursis pour le glyphosate ? Le 30 août, le ministère de la Transition écologique et solidaire a annoncé que la France voterait contre la proposition de la Commission européenne de prolonger pour dix ans la licence de l’herbicide, dont la dangerosité fait débat. Mais depuis, le gouvernement a multiplié les déclarations évoquant plutôt une sortie définitive du glyphosate « d’ici à la fin du quinquennat », soit 2022. Face à ce projet, une partie des agriculteurs grognent, la FNSEA en tête. Le premier syndicat agricole juge le glyphosate « indispensable encore à bon nombre d’agriculteurs français (...) faute notamment d’alternative. » C’est que le glyphosate, qui entre notamment dans la composition du Roundup, produit phare de Monsanto, est l’herbicide le plus vendu au monde. Peu cher, très efficace, il permet aux agriculteurs de détruire sur leurs parcelles les mauvaises herbes. Le produit pénètre les feuilles et se diffuse dans la plante par la sève jusqu’aux racines, entraînant sa mort rapide. « L’interdire nuirait grandement à la compétitivité de nos exploitations agricoles », prévient Jean-Louis Bernard, membre de l’Académie d’agriculture de France.
D’autres solutions existent
Générations futures, une association qui s’oppose à l’utilisation de pesticides dans l’agriculture, s’inscrit en faux contre cette analyse. « C’est oublier que le glyphosate est sur le marché depuis le début des années 1970 seulement et s’est développé surtout dans les années 1980, note François Veillerette, directeur de l’ONG. On arrivait donc à s’en passer avant. » Un autre syndicat agricole, la Confédération paysanne, ne dit pas non plus que le glyphosate est indispensable. « Nous sommes pour une sortie des pesticides, rappelle le syndicat. Dans notre réseau, nous avons des exemples d’agriculteurs qui sont parvenus à se passer du glyphosate. Dans l’élevage notamment. » Mais le syndicat reconnaît que se passer du glyphosate ne se fera pas sans douleur. « De nombreux facteurs entrent en compte. Les cultures, la taille de l’exploitation, sa santé économique, le nombre de salariés…, explique-t-on. Toujours dans notre réseau, on se rend compte que les arboriculteurs ont de plus grandes difficultés à faire sans l’herbicide. Parce qu’ils perdent en efficacité ou que la surcharge de travail devient trop importante. » Les pro-glyphosate nient aussi l’intérêt du labourage, parfois utilisé pour désherber. « Le labourage n’est pas sans conséquences pour l’environnement, indique Jean-Claude Bernard. Non seulement l’agriculteur doit passer à plusieurs reprises sur ses parcelles en tracteur, ce qui augmente les émissions de gaz à effet de serre, mais en retournant la terre, vous accélérez aussi l’érosion des sols. »