Horizon reconversion
Pendant la crise sanitaire, les Français ont été nombreux à passer des bilans de compétences. Leur objectif : changer de vie professionnelle.
« Je travaillais dans le domaine du tourisme depuis douze ans. Avec le Covid-19, je me suis retrouvée au chômage partiel et, le reste du temps, j’essayais de trouver des solutions pour rapatrier mes clients qui étaient à l’étranger. J’avais du mal à voir le bout du tunnel. D’où ma décision de faire un bilan de compétences pour me reconvertir. » Comme Sophie, de plus en plus de Français ont effectué un tel bilan depuis le début de la crise sanitaire, ou s’apprêtent à le faire. « En 2020, 50 000 bilans ont été financés via le compte personnel de formation [CPF], contre 33 000 en 2019, indique le ministère du Travail à 20bMinutes. Et, depuis le début de l’année 2021, 30 000 l’ont déjà été. Ce qui en fait la troisième formation la plus demandée. »
Une étape de « deux à quatre mois »
« Cette période a donné plus de temps aux salariés pour réfléchir à leur vie, à leurs conditions de travail, à leurs aspirations, explique Sandrine Beaulieu, à la tête d’Acerola, un centre de bilan de compétences. Surtout ceux qui sont en deuxième partie de carrière. Ce qui a conduit certains à vouloir changer de voie, et le bilan est la première étape pour cela. » Un déclic qu’a eu Alphonsine, qui a répondu à notre appel à témoins : « Cela fait dix ans que je suis garde d’enfants à domicile. Puis est venue la période du confinement. Je me suis remise en question plusieurs fois. J’ai fait un bilan de compétences pour avoir des réponses à mes questions et voir si, éventuellement, un autre métier me conviendrait. » Pour que la démarche soit utile, encore faut-il y consacrer du temps, insiste Bernard Monteil, membre du bureau de la Fédération de la formation professionnelle : « Le bilan s’étale sur deux à quatre mois. Car pour qu’il soit efficace, il faut laisser un temps de maturation entre deux entretiens entre le consultant et son client. » « Ce dernier doit aussi effectuer des travaux de recherches, répondre à des tests psychotechniques, prendre des contacts », complète Sandrine Beaulieu. Dans la majorité des cas, l’alchimie a lieu et le travail porte ses fruits : « Les gens se connaissent mieux après, savent ce qu’ils attendent de leur emploi et ont un projet pour les années à venir », constate Jérémy Plasseraud, responsable de Maformation.fr. « Dans les trois quarts des cas, le bilan conduit à se former, soit pour évoluer dans son métier, soit pour en changer, ajoute Bernard Monteil. Et dans un quart des cas, les gens sont confortés dans leur métier, mais envisagent de changer de service ou d’entreprise. » À Alphonsine, le bilan a donné des ailes : « Il en est ressorti que j’avais les compétences pour manager dans le secteur de la petite enfance. Je souhaite donc ouvrir une structure type microcrèche. La formatrice m’a donné pleins d’infos concernant les aides à la création. Il faut faire un bilan de compétences au moins une fois dans sa vie. »
Une démarche facilitée
Si les Français n’hésitent plus à effectuer cette démarche, c’est aussi parce qu’elle est plus facile qu’il y a quelques années, analyse Bernard Monteil : « Depuis la loi Avenir professionnel 2018, les salariés peuvent utiliser leur CPF sans intermédiaire. Ils peuvent effectuer un bilan sans en parler à leur employeur et se sentent beaucoup plus libres de le faire. » D’autant qu’ils peuvent aisément se l’offrir : « Un bilan coûte en moyenne 2 000 €, et les salariés ont généralement assez d’argent sur le CPF pour le financer », observe Jérémy Plasseraud.
« Dans les trois quarts des cas, le bilan conduit à se former, soit pour évoluer dans son métier, soit pour en changer. » Bernard Monteil, Fédération de la formation professionnelle