Verts, couleur primaire
Jadot, Piolle, Rousseau... L’élection présidentielle fait déjà tourner les têtes chez Europe Écologie-Les Verts.
En déplacement à Angers (Maineet-Loire) pour soutenir les candidats écologistes aux régionales lors d’un match de foot à la mi-juin, Yannick Jadot s’amusait, entre deux actions, de son souffle saccadé : « Le foot, ce n’est pas le même rythme qu’en politique, c’est intense. Une campagne, c’est plus un marathon. » L’eurodéputé, qui lorgne de longue date la présidentielle 2022, sait que le chemin est long pour accéder à l’Élysée. Première étape : la primaire organisée par Europe Écologie-Les Verts, fin septembre. Cette semaine, la partie s’est accélérée avec la candidature du maire de Grenoble, Éric Piolle (lire ci-contre), qui rejoint celle de Sandrine Rousseau. Yannick Jadot est, pour sa part, souvent resté ambigu sur une participation. Mais, mercredi soir sur TF1, le député européen a confirmé qu’il serait candidat, quelques jours avant de réunir ses soutiens à Colombes (Hautsde-Seine), ce week-end.
Plus centriste que ses rivaux
Au programme des festivités : le bilan des régionales, des ateliers programmatiques et, avant un discours de Yannick
Jadot dimanche, des discussions sur le fameux scrutin interne. « On doit examiner les modalités d’organisation, assure l’un de ses soutiens, l’ex-sénateur EELV Jean Desessard. S’agit-il d’une primaire identitaire, qui se bornerait à choisir le candidat le plus radical pour faire 5 %, ou permettra-t-elle de lancer une dynamique assez puissante pour que la force écologiste soit présente au second tour en mai 2022 ? »
Le camp Jadot sait qu’une primaire trop fermée (lire l’encadré) pourrait lui être fatale. Car le profil de l’eurodéputé, plus pragmatique et centriste que ses rivaux, n’est pas forcément du goût de la base la plus verte du parti. Ses partisans savent aussi que les militants écologistes ont souvent pris un malin plaisir à couper la tête de leurs favoris, comme Cécile Duflot, éliminée en 2016, ou Nicolas Hulot en 2011. « Deux faits nouveaux vont empêcher cette prophétie autoréalisatrice : Yannick est bien entouré par les cadres du parti et a travaillé son maillage territorial, répond l’élu européen Mounir Satouri, son coordinateur de campagne. Et je crois que les militants ont évolué en matière de responsabilité. L’urgence climatique nous impose de faire le choix du meilleur candidat. » « N’oublions pas que Jadot a déjà gagné la primaire en 2016 [avant de sceller une alliance avec Benoît Hamon]. C’était le même Jadot, déjà copain de CohnBendit [réputé centriste] et même plus qu’aujourd’hui », ironise Desessard. La sénatrice Esther Benbassa s’interroge de son côté sur le risque d’une faible participation, dans un contexte d’abstention historique aux dernières régionales. « Je souhaite que la primaire réunisse le plus de monde possible, mais le temps est court, ce sera difficile. Jadot a eu des hésitations car il craint de ne pas être désigné, et il a plus à perdre que les autres », dit-elle. Sur le plateau de TF1, Yannick Jadot a indiqué vouloir « construire une grande équipe de France de l’écologie qui gagnera l’élection présidentielle ». À condition de sortir en tête de la primaire en septembre.
Une charte de valeurs
Les conditions de la primaire verte sont déjà fixées : elle sera ouverte aux sympathisants écologistes, sous condition de la signature d’une charte de valeurs et d’une participation de 2 €. Dans l’entourage de Yannick Jadot, on répète depuis plusieurs mois le même discours :
« Avoir une primaire restreinte sur nousmêmes, autour de 30 000 participants serait un échec. Il faut espérer doubler, voire tripler ce chiffre pour obtenir une force propulsive. »
Je ne suis pas sûr qu’il y ait des différences de fond majeures entre les candidats. Notre espace politique propose des solutions très homogènes sur les questions sociale, climatique et démocratique. Une candidature, c’est une vision, une méthode et une incarnation.
Que proposez-vous de différent ?
Je suis là pour fédérer un arc humaniste, comme à Grenoble en 2014 et en 2020. Je viens apporter cette expérience de la victoire, de l’exercice du pouvoir, validée par ma réélection en 2020. J’ai aussi ce rapport aux territoires, loin des sphères parisiennes.
Votre mesure phare ne concerne pas l’écologie mais les institutions, avec un référendum constitutionnel. Pourquoi ?
Il faut réhabiliter l’idée de progrès : nous pouvons vivre mieux à l’avenir. Différemment, mais mieux. Pour ça, sortons du pouvoir jupitérien. J’utiliserai l’article 11 de la Constitution pour organiser un référendum dès les législatives [en juin 2022]. Il portera sur l’introduction du climat dans l’article 1er de la Constitution, la séparation de la justice et du pouvoir exécutif, la création du référendum d’initiative citoyenne, la limitation des pouvoirs du président et la proportionnelle à l’Assemblée.
« Je souhaite que la primaire réunisse le plus de monde possible, mais le temps est court. » Esther Benbassa, sénatrice EELV