Présidentielle Sans meeting futuriste, t’es hors piste
Certains candidats ont mis le paquet sur les nouvelles technologies pendant cette campagne. Jusqu’où pourraient-ils aller à l’avenir ?
Cette année, la campagne présidentielle se conjugue au futur. Certains candidats ont mis le paquet pour créer des grands rassemblements innovants et en mettre plein la vue (et l’odorat) à leurs militants. À Lille, mardi, on a vu Jean-Luc Mélenchon se multiplier sous forme d’hologramme dans 11 villes de France, quelques semaines après avoir organisé un meeting olfactif et immersif. De son côté, Emmanuel Macron s’est invité dans le jeu Minecraft le 2 avril, pour offrir un meeting virtuel.
Va-t-on se retrouver en 2027 face à un avatar lapin en guise de candidat à la présidentielle, dans un métavers décentralisé où les militants financent la campagne à coups de NFT? C’est bien possible. Surfer sur les jeux vidéo ou les innovations est d’abord une question d’image pour les candidats. « On montre qu’on maîtrise des codes, qu’on n’est pas à la traîne, analyse Olivier Mauco, enseignant à Sciences po et spécialiste des jeux vidéo et de la politique. Les meetings de Jean-Luc Mélenchon sont assez spectaculaires. » Pour le candidat de La France insoumise, c’est aussi une façon de faire oublier son âge. « Il dit : “Je suis jeune dans ma pratique et je vous fais vivre un moment unique” », confirme le spécialiste en communication Philippe Moreau-Chevrolet.
Des applaudissements téléguidés
Il y a d’autres innovations qu’on ne voit pas. LREM, par exemple, a une grande maîtrise de l’orchestration. « Le fait de repérer les chansons populaires sur
Spotify, comme La Kiffance, de Naps, et de la détourner pour en faire un chant de meeting, c’est très intelligent, et cela ne se voit pas comme un hologramme », note le spécialiste en communication politique, qui rappelle que, lors d’un meeting d’Emmanuel Macron en 2017, les applaudissements étaient téléguidés via les smartphones pour donner une impression de ferveur populaire. On peut aussi facilement imaginer des meetings dans les métavers pour la campagne de 2027. «Aujourd’hui, la question de la sécurité dans les meetings est croissante, ça coûte cher, il faut se déplacer, poursuit Philippe Moreau-Chevrolet. En politique, le métavers aurait l’avantage de réunir des gens sur différents territoires : vous pourrez modérer, bannir, faciliter le dialogue… » Si on se la joue encore plus futuriste, on peut imaginer un parti décentralisé et autonome sans aucun candidat pour le porter. C’est possible avec les DAO, des « organisations décentralisées et autonomes ». Ce moyen de construire une communauté sur le Web, basé sur la blockchain, permet d’inscrire les règles de gouvernance de façon immuable sur la technologie (ethereum, dont la monnaie est connue sous le nom d’ether, la deuxième blockchain après le bitcoin). « Ce n’est pas absurde qu’une DAO émerge pour prendre le pouvoir », prophétise Olivier Mauco. À la place du candidat, on aurait le smart contract, c’est-à-dire les programmes informatiques qui permettent d’exécuter les règles définies par les membres. Imaginez un peu un parti qui n’a plus besoin d’une incarnation charismatique pour se lancer en campagne. Là, l’avatar lapin ou panda prendrait la place d’une Valérie Pécresse (LR) ou d’un Jean Lassalle (Résistons !) pour porter les idées de ses militants dans le métavers. Ça remobiliserait peut-être les abstentionnistes, qui sait ?