MONEY JUNGLE, NOTRE FEUILLETON
David d’Équainville (éditeur et auteur) et Pascal Henry (journaliste d’investigation et réalisateur) ont raconté dans la saison 1 de Money Jungle, une série librement inspirée de faits réels, les aventures d’une jeune avocate fascinée par les complaisances achetées par l’argent de son employeur milliardaire, l’oligarque Oleg Chestov. Dans le contexte de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, la saison 2 suit les traces du milliardaire, occupé à mettre à l’abri sa collection de chefs-d’oeuvre et le reste de sa fortune.
Résumé de l’épisode 6 : les 250 m de long du yacht d’Oleg Chestov n’ont pas l’intention de quitter l’abri des eaux territoriales de la Barbade, nouvelle république carïbéenne. Par précaution, l’oligarque a fait retirer l’AIS, ce positionnement GPS obligatoire sur ce type de navire. De Chypre, il donne des ordres au capitaine tout en préparant une opération financière, un coup tordu contre les intérêts de la Russie.
Billard à trois bandes
La veille, un émissaire venu de Moscou avait passé le message à Chestov : officiellement, le maître du Kremlin n’avait pas du tout apprécié son absence à la réunion des vassaux du régime, et l’avait fait savoir.
Ce 24 février au soir, ils étaient tous venus, 40 oligarques cousus d’or, réunis par les circonstances, pitoyablement assis sur des chaises alignées face à leur suzerain, dans l’immense hall Catherine de l’ancien Sénat russe. Ils devaient renouveler leur serment de soumission, au moment même où les blindés russes envahissaient l’Ukraine. Contrairement aux apparences, l’affaire était entendue. Le Kremlin avait désigné Chestov pour jouer le rôle du vilain petit canard. Il était plus utile en volatile mis au coin à l’étranger qu’en soutien de « l’opération spéciale ». Il brillait donc par son absence et laissait croire qu’il avait pris ses distances avec le pouvoir. Son don à la Croix-Rouge pour les réfugiés d’Ukraine lui servait encore de sauf-conduit face aux Occidentaux. Il se gardait bien, au demeurant, de condamner ou de seulement critiquer le tsar de la sainte Russie.
De son repaire de Chypre, il n’avait pas bougé. Pour l’instant, personne ne venait s’étonner que son immense chalet suisse de Gstaad, son appartement new-yorkais d’une valeur 88 millions de dollars, sa villa d’Hawaï, son club de foot ne soient pas saisis ! Il se sentait protégé grâce à l’accord secret noué par son indéfectible allié, l’oligarque Othman Rakhimov. Lui était bien présent au Kremlin lors de cette soirée de remise au pas, fidèle représentant de Chestov auprès du tsar. (à suivre)