Etat critique
Epidémies, vieillissement de la population, manque de généralistes... Les services d’urgences sont particulièrement saturés, comme à Paris, Strasbourg et Rennes.
Des patients contraints d’attendre des heures, des brancards installés dans les couloirs, un personnel soignant débordé et des décès de malades en salle d’attente… Selon l’association Samu-Urgences de France, « plus de 15 000 patients ont passé la nuit sur un brancard des urgences » depuis le début de l’année. Christophe Prudhomme, porteparole de l’association des médecins urgentistes de France (Amuf), explique que « des études montrent que cette surcharge cause une surmortalité de 9 % des patients ». Ce lundi, de nombreux établissements seront encore engorgés, comme à Strasbourg. « La situation est difficile, constate Marie, infirmière à l’hôpital de Hautepierre. On a vu un patient attendre jusqu’à quarante heures sur un brancard. » A Paris, les services d’urgences adultes des établissements de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris ont un taux d’occupation de 15 à 25 % plus élevé que la moyenne de 2016, rapporte Le Monde.
« On a tiré sur la corde »
Certains établissements mettent cet afflux de patients sur le compte des épidémies. Un phénomène aggravé par le vieillissement de la population. « On a l’habitude du flux massif en période hivernale, explique Marie. Mais on fait face à une population polypathologique, qui a de plus en plus de maladies comme le diabète ou l’hypertension, encore plus fragilisée avec la grippe. Ce sont des personnes qui exigent une surveillance, une hospitalisation. » Pour Christophe Prudhomme, cette saturation reflète un effet de seuil : « On a tiré sur la corde pendant des années, en supprimant notamment 100 000 lits en vingt ans. Cela ne va pas s’arranger : en 2018, on nous demande de supprimer 55 postes de personnel non médical et huit postes de médecins dans le groupe hospitalier de Seine-Saint-Denis. » Le député macroniste Thomas Mesnier, médecin urgentiste à Angoulême (Charente), pointe aussi le facteur de la démographie médicale : « L’accès aux médecins généralistes est parfois difficile, et les urgences offrent l’accès aux soins pour tous, sans avance de frais, avec la possibilité de consulter des spécialistes. » En protestation, des personnels soignants prévoient de participer à la journée de grève des fonctionnaires, jeudi. Dans certains hôpitaux, l’ouverture des urgences 24/24 h pourrait être remise en cause, comme à Clamecy (Nièvre) ou Avallon (Yonne). Du côté du gouvernement, la ministre de la Santé Agnès Buzyn a confié plusieurs missions à des parlementaires sur le système de soins français.