Pourquoi il faut lire Rumiko Takahashi, la reine du manga
«20 Minutes» revient sur l’oeuvre de la finaliste du grand prix du festival d’Angoulême, qui se tient de jeudi à dimanche
Si elle l’emporte face au Français Emmanuel Guibert et à l’Américain Chris Ware, la Japonaise Rumiko Takahashi pourrait être la deuxième mangaka à être sacrée Grand Prix du festival d’Angoulême (Charente), qui se tient de jeudi à dimanche. Son nom est moins connu en France qu’un Toriyama (« Dragon Ball ») ou un Miyazaki (Le Voyage de Chihiro), mais ses oeuvres le sont tout autant que les leurs.
V Des situations loufoques. « Urusei Yatsura », c’est « Lamu » en français, du nom de cette extraterrestre à la tenue tigrée qui débarque avec son peuple pour envahir la Terre. Rumiko Takahashi laisse ainsi libre cours à sa folle imagination. Les situations saugrenues, toujours renouvelées, renvoient autant à l’absurde de certaines émissions télé japonaises qu’à
l’humour des Monty Python. Son univers est propice à de nombreuses expérimentations, les siennes, mais pas seulement. Le réalisateur Mamoru Oshii (Ghost in the Shell) a ainsi signé avec Lamu, Un rêve sans fin une adaptation très libre et surtout l’un des premiers films d’auteur de la japanime moderne. « Urusei Yatsura », 18 tomes (éd. Glénat)
V Une comédie romantique. En parallèle à « Urusei Yatsura », Rumiko Takahashi, à 23 ans, commence un autre manga, « Maison Ikkoku » alias « Juliette, je t’aime ». Les délires sont ici souvent circonscrits à la chambre de l’étudiant raté Yusaku Godai, où ses colocataires hauts en couleur improvisent des fêtes arrosées tous les soirs. « Maison Ikkoku » est avant tout une comédie romantique – un modèle du genre – entre Godai et Kyoko Otonashi, nouvelle concierge et jeune veuve. Enfin, surtout dans le dessin animé. Le manga, lui, se fait aussi le portrait d’un Japon qui vit au rythme des fins de mois difficiles, des bols de ramens et des us et coutumes. Le lecteur referme chaque tome comme s’il était lui-même un des locataires de la pension des Miiimoooosaaas. « Maison Ikkoku », 10 tomes (éd. Tonkam)
V Un succès mondial. Avec « Ranma ½ », Rumiko Takahashi s’offre son plus gros succès à travers le monde et s’impose comme la reine du shônen. Tout y est : ninjas, combats, pouvoirs, personnages perchés et gags visuels. Là où le manga fait la différence, c’est dans son jeu autour du genre. Lamu et Kyoko sont déjà, chacune à leur manière, des personnages de femmes fortes, à côté desquelles les hommes font peine à voir. Ranma change de sexe selon la température de l’eau, et, si la situation est l’occasion de nombreux quiproquos, elle ne change rien du personnage, de sa personnalité, de ses capacités. Sachant que le shônen s’adresse «officiellement» aux garçons, en opposition au shôjo pour les filles, la mangaka livre ici, mine de rien, une leçon d’égalité et de tolérance. « Ranma ½ », 38 tomes en édition simple, 15 tomes en édition deluxe (éd. Glénat).