La vie chère cristallise toujours les tensions à La Réunion
Social Sur l’île, les produits d’alimentation coûtent 37 % plus cher qu’en métropole
Des « gilets jaunes » ont filtré les accès d’un centre commercial du nord-est de l’île mardi. « Il est hors de question que l’on parle des prix et de la vie chère sans nous », a lancé l’un des manifestants, cité par Imaz Press Réunion. Un coup de gueule justifié par le fait que, la veille, une réunion des décideurs du bouclier-qualité-prix (BQP) se soit tenue sans eux à la préfecture de Saint-Denis, le chef-lieu… avant qu’une délégation de quatre personnes ne soit finalement reçue. Venue en urgence à La Réunion pour trois jours (du 28 novembre au 1er décembre), au plus fort de la crise des « gilets jaunes », la ministre des Outremer, Annick Girardin, avait notamment annoncé une baisse de 10 % du coût du BQP – il s’établissait à 290 € en 2018, rappelle Zinfos974. Un rabais insuffisant pour lutter contre la vie chère, l’une des principales revendications des « gilets jaunes » réunionnais, selon les témoignages que 20 Minutes a pu recueillir sur place il y a quelques semaines. Selon la dernière enquête de comparaison des prix avec la France métropolitaine, établie en 2015 par l’Insee, les prix sont plus élevés de 7,1 % à La Réunion.
«Rien de rationnel»
Dans le détail, le poste de dépense le plus important est celui de l’alimentation : les produits sont en effet 36,8 % plus chers à La Réunion. Les communications et la santé sont également plus coûteuses dans l’île (respectivement +18,3% et +14,6%). Un écart de prix incompréhensible pour bon nombre de ménages réunionnais et d’autant plus inacceptable que 23 % de la population est au chômage (chiffres Insee 2017). « Dans certains cas, rien de rationnel ne semble pouvoir expliquer les différences de prix entre les productions outre-mer et les produits importés » dans les territoires ultramarins, concédait d’ailleurs lundi soir Annick Girardin, qui présentait depuis l’hôtel de Montmorin (Paris, 7e) ses priorités en matière économique pour 2019. Si le problème a pris tant de relief depuis le début de la crise sociale à La Réunion, c’est qu’il est loin d’être récent. Il est avant tout structurel : « L’insularité empêche l’économie d’échelle », explique Jean-François Hoarau, professeur des universités en sciences économiques à l’université de La Réunion et directeur du Centre d’économie et de management de l’océan Indien (Cemoi). Pas facile, en effet, de baisser le coût unitaire d’un produit en augmentant la quantité de production sur un marché aussi restreint que celui de La Réunion (866 506 habitants estimés au 1er janvier, selon l’Insee). « Nous négocierons les prix et les taxes avec les acteurs économiques, sinon, c’est moi qui fixerai les prix », assurait Annick Girardin aux « gilets jaunes » le 30 novembre.