20 Minutes (Strasbourg)

Au centre des appels

« 20 Minutes » retrace les heures passées par Alexandre Benalla dans un bar à chicha la nuit où l’affaire a éclaté

- Vincent Vantighem

C’était dans un bar à chicha, près de l’Elysée, le 18 juillet 2018, peu après 20h... «20 Minutes» retrace la soirée passée au téléphone par le chargé de mission d’Emmanuel Macron Alexandre Benalla, au moment où l’affaire a éclaté.

Kylian Mbappé entre dans la défense argentine et dans le coeur des Français. Il est un peu plus de 20 h, le 18 juillet, quand le Damas Café (Paris, 8e) rediffuse les meilleurs moments de la victoire des Bleus. Mais Alexandre Benalla n’a pas la tête au football. A 13 h, Le Monde l’a appelé pour le prévenir qu’il avait été « identifié » comme étant l’auteur de violences sur des manifestan­ts du 1er-Mai. « On avait l’impression qu’il s’y attendait, sans s’y attendre vraiment, raconte Christian Prouteau, fondateur du Groupe de sécurité de la présidence de la République (GSPR). C’était une sensation assez étrange… » Pas suffisamme­nt pour changer ses habitudes. Avec son ami Vincent Crase – lui aussi mis en examen pour les violences du 1er-Mai – le chargé de mission rejoint ce bar à chicha qu’il affectionn­e, situé rue du Colisée. A 500 m de l’Elysée, il tente de se détendre. Mais les vibrations de son portable témoignent de la crise qui enfle. Entre 20 h 30 et 2 h 28, les enquêteurs ont ainsi relevé des contacts avec 33 correspond­ants différents. Dans la liste : un ancien boxeur, un animateur radio, un ex-député, le secrétaire général d’un préfet, un avocat, un général de gendarmeri­e et beaucoup de policiers. Car, à la préfecture de police, un commissair­e un peu zélé se met en tête de dégoter des images de vidéosurve­illance démontrant que les manifestan­ts étaient eux-mêmes violents, histoire d’aider Benalla dans sa défense.

On appelle ces images des PZVP, pour « Plans de zone de la ville de Paris ». Les sortir du système est illégal, mais le commissair­e a l’appui de son supérieur. Celui-ci envoie même Jean-Yves Hunault pour l’aider. Il s’agit de l’officier de liaison avec l’Elysée.

Les deux hommes galèrent à copier le CD contenant les images. Ils se rendent au domicile du commissair­e pour une autre tentative. Mais la technique a raison d’eux. Il est finalement plus de 23 h quand Jean-Yves Hunault se résout à remettre le CD original à Alexandre Benalla. Juste avant, il échange des SMS avec Jimmy Reffas, l’ex-garde du corps de Johnny Hallyday, dont le rôle intrigue les enquêteurs. Sollicité par 20 Minutes, celui qui protégeait le « Taulier » dément avoir eu un contact ce soir-là avec Jean-Yves Hunault ou Alexandre Benalla, alors que les enquêteurs disposent de la preuve du contraire.

L’ex-chargé de mission, lui, est toujours au Damas Café. Et son téléphone vibre encore. Certains collègues de l’Elysée prennent des nouvelles depuis Périgueux (Dordogne), où ils accompagne­nt Emmanuel Macron, qui doit dévoiler, le lendemain, le nouveau timbrepost­e. Parmi eux : le médecin-chef du président ou son chef de cabinet… Conseiller de l’ombre, Ludovic Chaker est, de son côté, resté à Paris. Il est en contact permanent avec le Damas Café. Tout comme Ismaël Emelien. Il est 2h25. Le bar à chicha s’apprête à fermer quand le conseiller envoie encore des SMS à Alexandre Benalla. Son téléphone « borne » dans le même secteur à 2h28. Pour les enquêteurs, Ismaël Emelien semble donc « le plus en capacité » d’avoir pu récupérer le fameux CD contenant les images de vidéosurve­illance ce soir-là. Est-ce lui qui a ensuite permis leur diffusion sur un compte Twitter proche de La République en marche avec des éléments de langage pro-Benalla ? Comme une façon de riposter à la polémique naissante. Contacté par 20 Minutes, ce dernier n’a pas souhaité faire de « commentair­e ». Depuis, Alexandre Benalla aurait quitté Paris. Il ne sait peut-être pas que le Damas Café a changé de nom. Mais il propose toujours de fumer la chicha en regardant du foot.

D’intrigants SMS avec l’ancien garde du corps de Johnny Hallyday.

 ??  ?? Alexandre Benalla à Paris, le 11 septembre 2018. A nos lecteurs. Chaque mardi, retrouvez « 20 Minutes » en version PDF sur le site et les applicatio­ns mobiles. Et suivez l’actualité sur l’ensemble de nos supports numériques.
Alexandre Benalla à Paris, le 11 septembre 2018. A nos lecteurs. Chaque mardi, retrouvez « 20 Minutes » en version PDF sur le site et les applicatio­ns mobiles. Et suivez l’actualité sur l’ensemble de nos supports numériques.
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Le 18 juillet, Benalla apprend avoir été « identifié » comme étant l’auteur de violences sur des manifestan­ts le 1er-Mai.

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