«Ce forfait ne suffit pas»
Le président a annoncé la prise en charge de dix séances de psy pour les enfants
« Je ne vais pas mettre en péril la santé mentale de ma fille de 6 ans, assure Aurélie, 39 ans. Elle a de plus en plus de mal à gérer ses émotions et les contraintes liées au Covid-19. » Alors cette mère n’hésitera pas à demander au pédiatre à bénéficier du forfait psy pour son enfant, annoncé par Emmanuel Macron la semaine dernière. Le chef de l’Etat a précisé que dix séances seraient prépayées pour les mineurs de 3 à 17 ans qui souffrent de la crise sanitaire.
Des structures «saturées»
Ce coup de pouce lève un frein financier, mais aussi le tabou sur la santé mentale. «Les pédopsychiatres alertent car il y a de plus en plus de passages aux urgences psychiatriques », assure Nicolas Franck, psychiatre à Lyon. Ces enfants, s’ils s’isolent ou plongent dans une phobie, une dépression, risquent gros. « Les enfants sont vulnérables, en construction, reprend le psychiatre. En trop grande souffrance, ils risquent de ne pas acquérir certaines choses. » Encore faut-il avoir les moyens de traiter ces jeunes patients. Or la France manque de psychiatres, et plus particulièrement de pédopsychiatres. « Les structures publiques sont saturées, regrette Nicolas Franck. Rembourser dix séances chez un psychologue, en ville, c’est une façon d’augmenter l’offre. Ce forfait est nécessaire, mais il ne suffit pas. »
Une opinion partagée par certains parents qui ont répondu à notre appel à témoignages. «Cette annonce paraît bien creuse ici dans le Poitou », regrette Aude, 39 ans. Son fils s’est retrouvé sans solution de suivi psychologique après la réorientation du centre médico-psychopédagogique : « “Offrir” des séances alors qu’on ne propose pas une offre suffisante, cela montre à quel point le gouvernement est loin de la réalité du terrain. » Aline Nativel Id Hammou, psychologue clinicienne spécialiste des enfants, rappelle que la téléconsultation peut être une solution. « A partir de 10 ans, c’est faisable. Ce n’est pas pareil que le présentiel, mais cela peut être une porte d’entrée. »