« La population n’est pas responsable de tous les maux »
Alors que nous devrions être 8 milliards de Terriens mardi, le démographe Jacques Véron analyse l’accroissement de la population et ses répercussions, notamment sur l’environnement.
Avons-nous connu des phases de croissance démographique aussi importantes que celle en cours ? Oui, il y a eu des phases de croissance. Par exemple, lorsque l’apprivoisement du feu ou l’apparition de l’agriculture ont permis à la population mondiale d’augmenter de façon importante. Mais il n’y en avait jamais eu de comparable à celle que nous observons, depuis 1800. Cette nouvelle révolution démographique, liée à une lutte efficace contre les maladies et la mort, va culminer dans les années 1960, avec un taux de croissance supérieur à 2 %. À ce rythme, une population a doublé en trente-cinq ans seulement. Depuis, il a baissé. Dans son scénario « haute fécondité », l’ONU anticipe 15 milliards d’êtres humains en 2100…
Je n’y crois pas. Le scénario moyen de l’ONU – qui prévoit 10,4 milliards d’humains en 2086, puis une stabilisation – semble bien plus probable. À l’horizon 2050, ce sont huit pays [l’Égypte, la République démocratique du Congo, le Nigéria, l’Éthiopie, la Tanzanie, l’Inde, le Pakistan et les Philippines] qui alimenteront essentiellement la croissance démographique. Dans beaucoup d’autres endroits, on constate des baisses de la fécondité. Certains pays voient déjà leur population diminuer. C’est le cas du Japon, de l’Italie, de la Corée du Sud… En France, on n’y est pas encore. Notre taux de fécondité – 1,84 enfant par femme – reste élevé, du moins comparé à d’autres pays européens.
Faut-il alors avoir peur de la population mondiale, notamment pour l’environnement ? L’accroissement de la population est un facteur important de pression, mais ce n’est pas le seul. Exemple sur les gaz à effet de serre. D’un côté, la Chine, pays le plus peuplé au monde, est le premier pays émetteur, devant les ÉtatsUnis. Mais si on regarde les émissions par habitant, les États-Unis devancent nettement la Chine. Autrement dit, il ne faut pas tenir la population comme responsable de tout ce qui va mal, mais ajouter dans l’équation les effets « mode de vie » et « technologie », tout aussi déterminants.