L’intestin n’est plus un sujet tabou et devient même un tube en librairie
Avancées de la recherche, prise de conscience et marketing ont brisé un tabou autour de l’organe
La santé commence par les intestins, Les Secrets de l’intestin, filtre de notre corps ou encore L’intestin au secours du cerveau. Depuis près de deux ans, la thématique intestinale s’est implantée en librairie. Le caca fait vendre et les livres s’écoulent « parce que cela intéresse beaucoup les lecteurs », assure Anne Bonvoisin des éditions Marabout. Tout a commencé avec Giulia Enders. Cette gastro-entérologue a brisé un tabou en publiant Le Charme discret de l’intestin, un best-seller vendu à des millions d’exemplaires. En dissertant sur « l’art du bien chier », elle a su mettre des mots simples sur ce dont personne n’osait parler. Pour Harry Sokol, gastroentérologue à l’hôpital Saint-Antoine à Paris, cette publication a permis à Monsieur Tout-le-monde de s’informer sur le sujet : « Il y a eu des avancées en ce qui concerne le microbiote – anciennement appelées flore intestinale. On a découvert son rôle majeur dans notre physiologie et sur certaines maladies. » L’intestin, considéré comme un « deuxième cerveau », aurait ainsi un lien direct avec le développement de certaines maladies neuro-dégénératives comme Alzheimer, Parkinson, mais aussi les troubles de l’humeur, l’autisme, la dépression, le diabète ou l’obésité. Le ventre contient pas moins de deux cents millions de neurones qui veillent à la digestion et communiquent directement avec le cerveau. Pour le professeur Jean-Marc Sabaté, gastro-entérologue à l’hôpital Mourier de Colombes (Hauts-de-Seine) et chercheur à l’Inserm, le décryptage de ces mécanismes a aussi permis d’améliorer la compréhension d’autres pathologies, comme le syndrome de l’intestin irritable. « Jusquelà, on disait que ce genre de maladies était psychosomatique, lié au stress. On disait aux patients : ‘‘C’est dans votre tête’’, parce que leurs examens et leurs prises de sang étaient normaux. » Désormais, de nouveaux traitements apparaissent. Certains médecins utilisent l’hypnose, préconisent des régimes et invitent les patients à bouleverser leur mode de vie. « Les gens savent maintenant qu’ils peuvent avoir un certain contrôle sur leur santé en soignant leur ventre, embraie la professeure Francisca Joly, auteure de L’Intestin, notre deuxième cerveau. Le grand public commence à se rendre compte de l’importance de cet organe, non pas pour digérer, mais pour rester en bonne santé. On peut changer les choses par l’alimentation, ce qui est à la portée de tout le monde. »
Le ventre contient deux cents millions de neurones qui veillent à la digestion.